Pape Massar Ndoye a du mal à digérer les incidents ayant émaillé le match Sénégal-Côte d’Ivoire. Pour l’ancien membre de la Fédération, El Hadj Diouf ne peut être exonéré de ce qui s’est passé samedi au stade «Senghor». Selon l’ancien fédéral, le comportement de Diouf et «son discours violent» ont conduit à «cette situation calamiteuse». Il a, dans la même foulée, accusé une certaine presse qui permet au bad boy d’insulter les gens.
Préparation du match : «Il y a eu un déficit de communication»
«Il y a eu un déficit de communication des responsables fédéraux. Quand le Sénégal qui est classé 15e en Afrique rencontre la Côte d’Ivoire qui est la première Nation sportive, quand dans le monde, la Côte d’Ivoire est 16e, le Sénégal 68e, le bon sens recommande qu’on se prépare beaucoup plus à la défaite qu’à la victoire. Nous avons une génération qui est arrivée au terme de son cycle : c’est celle de 2002 et une autre équipe en reconstruction. Une deuxième raison supplémentaire pour dire au public sportif, à la population, à l’opinion que nous sommes en reconstruction, c’est une étape. L’objectif, c’est jusqu’en 2015-2018, mais ce n’est pas 2013. Encore moins 2012. Si les gens étaient préparés à cela, comme la France l’a fait récemment face à l’Espagne, avec 90 % de Français qui étaient préparés à une défaite, on n’en serait pas là.»
Le cas El Hadj Diouf : «Son discours violent a conduit à cette situation calamiteuse»
«On ne peut pas exonérer El Hadj Diouf de ce qui s’est passé. Le faire, c’est faire dans l’hypocrisie. On se souvient de ses déclarations antérieures. A chaque fois qu’il a fait une sortie, il a préparé les gens à une défaite. Il a tellement tiré sur l’équipe en traitant les dirigeants de «tocards». Ensuite, parallèlement, il a dit : «Je viendrai au match, mais évidemment, je suis convaincu qu’on va perdre.» Alors, pourquoi aller acheter mille billets quand on est sûr auparavant qu’on va perdre ? C’est certainement pour célébrer une défaite. Le forcing qu’il exerce pour revenir en Equipe nationale ne s’explique pas. Nous avons connu avant des joueurs dix fois plus talentueux que lui, qui ont fait leur temps et c’est terminé ! Henri Camara continue à jouer et à planter des buts, mais on ne l’a jamais entendu taper à la porte pour dire : «Il faut que je revienne. Sans moi, rien ne peut marcher.» Voilà donc, quelqu’un qui veut prendre en otage tout le football sénégalais. Et il faut oser le dire, il a autour de lui une armée de nervis qui ne comprennent rien au football, sinon la violence, plus une certaine presse qui distille à souhait des déclarations incendiaires qu’il fait à l’encontre des dirigeants. Volontairement ou involontairement, il a dressé le public contre ces dirigeants à travers un discours à la limite violent, chargé, passionné. C’est ainsi que des gens ont ciblé les dirigeants qui étaient dans la loge. Mieux encore, d’après ce qu’on m’a dit et cela reste à vérifier : il paraît que El Hadj Diouf a voulu plusieurs fois couper le cortège de l’Equipe nationale au niveau de l’hôtel Radisson et sur la Vdn. Pourquoi tout cela ? Tous ces indices concordants nous ramènent à un plan savamment ourdi et qui a abouti à ce chaos. Et c’est tous ces ingrédients qui ont conduit à cette situation calamiteuse que nous avons déplorée et qui n’est pas véritablement la bonne image du Sénégalais.»
Avenir de l’équipe : «Le moment est venu de chercher un très bon entraîneur»
«C’est une équipe d’avenir. Je suis certain, si elle est bien encadrée, elle peut nous valoir de grandes satisfactions à l’horizon 2015. J’en suis convaincu. Pour cela, il faut un bon entraîneur. Le moment est venu de chercher un très bon entraîneur. Pas le moins disant parce que souvent c’est le moins faisant. Il nous faut un entraîneur de très haut niveau capable de parfaire la formation de ces jeunes. Cela peut durer quatre ans. On peut réaliser quelque chose avec les éliminatoires du Mondial 2014, mais je veux être prudent. Nous avons l’habitude de faire des raccourcis d’une campagne, mais une bonne formation demande quatre ans. Nous avons ce qu’il faut, mais c’est sur le banc qu’il faut apporter des correctifs. Même au plan interne, il y a beaucoup de réajustements à faire. Nous faisons un football dit professionnel, mais qui n’en est pas un. Les joueurs sont sous-payés, des arriérés de paiement, on n’a pas assez d’infrastructures. Le Gabon (voir page 9) qui va tenter le football professionnel, le gouvernement a déjà mis 12 milliards Cfa pour accompagner le football. En quatre ans, l’Etat n’a mis aucun franc. On ne veut pas faire comme les autres et on veut avoir les mêmes résultats, ce n’est pas possible ! La réalité en face : c’est une bonne formation, des infrastructures, ce sont des moyens importants. Ce n’est pas avec 0,5% du budget pour une cinquantaine de fédérations qu’on peut avoir des résultats. C’est toute une politique sportive à revoir : le cadre juridique, le nombre de clubs, en ayant de grandes équipes autour des villes plutôt que d’avoir une cinquantaine dans une même ville.»
Des Sénégalais pour aller supporter les Eléphants : «L’initiative du ministre pose un problème sur le plan diplomatique»
«Que le ministre des Sports récompense ou soutienne des Sénégalais qui veulent aller voir la Coupe d’Afrique, j’applaudis des deux mains. Mais que les gens aillent supporter la Côte d’Ivoire contre d’autres pays africains, je dis non ! Nous avons une politique extérieure qui ne se limite pas seulement au sport. Le Mali est notre voisin. Comment aller supporter la Côte d’Ivoire contre le Mali ? Trouvez-vous cela normal ? Ça pose problème sur le plan diplomatique. Autre chose : quand certains disent (dont El Hadj Diouf), nous voulons Pape Diouf (ancien président de l’Om) à la tête de la Fédé de football (Fsf). C’est un Sénégalais très compétent que je respecte beaucoup. Mais, il faut commencer par lui demander de venir créer un Centre de formation au Sénégal ou diriger un club.»
La violence «Tant qu’on se lance dans des compromis et compromissions»
«La violence qui est en train de gagner du terrain et qui trouve sa source et ses voies d’irrigation à partir des Navétanes et de la lutte, il faut qu’on y mette un terme. Sinon, nous sommes tous en sursis. Le sport, c’est le Fair-play. Autre chose : on est en train d’installer l’impunité dans le pays. C’est le cas au niveau de la lutte lorsque Zoss a été agressé par Boy Niang. Tout de suite, on se lance dans des compromis et des compromissions. Immédiatement, les gens commençaient à dire : «Faisons la paix.» Il faut d’abord sévir et sanctionner avant d’envisager un droit de grâce. Malheureusement, on préfère opter pour des démarches incessantes de pacification, ce qui est de l’hypocrisie.»