El Hadji Diouf crache encore du feu. Cette fois, l’ancien goléador des «Lions» s’en prend au centre de Diambars, qui selon lui, est un «échec». Et pour cause, soutient le sociétaire du club Sabbah FA, Premier League malaisien, que Sud Quotidien a rencontré à Kuala Lumpur, le centre du président Saer Seck «n’a produit qu’un international et demi, en dix, voire douze ans» d’existence. Revenant sur la sélection nationale version Aliou Cissé, Dioufy estime, qu’elle manque non seulement de talents, mais aussi de joueurs de caractère, capables de produire et de gagner des matches d’hommes. Pis, le double ballon d’or africain, qui appelle à des assises du sport et du football en particulier, soutient que «le vrai problème du football sénégalais, c’est qu’il n’y a plus de talents».
Pourquoi vous avez décidé de jouer ici en Malaisie ?
Quand j’ai pris la décision de quitter l’Europe, je voulais un autre challenge sportif devant me permettre de rendre au football ce qu’il m’a donné. C’est pourquoi, j’ai décidé d’aller évoluer dans un pays où le football n’est pas forcément une religion et essayer d’inverser la vapeur en formant aussi leurs jeunes. Pourtant, j’avais eu pas mal d’offres, notamment aux Emirats, en Turquie, mais je voulais aller quelque part pour donner mon savoir-faire. Et quand la Malaisie a fait appel à moi, j’ai dit oui tout de suite.
Les Malais ne connaissaient pas le Sénégal. Même s’ils connaissent bien sûr, El Hadji Diouf (rires). Il fallait donc que je montre la voie pour les autres joueurs africains. Et, les choses commencent à changer. Les gens s’intéressent de plus en plus à ce championnat. La preuve, le plus grand public de mon équipe l’an dernier était de 1000 personnes. Cette année, nous faisons 25000 spectateurs pour chaque match.
Vous êtes en train de dire qu’il y a eu l’effet El Hadji Diouf ?
On peut le dire. Effectivement, il y a eu l’effet El Hadji Diouf. Je peux quand même leur offrir beaucoup de choses. D’abord, du spectacle. Ensuite, attirer d’autres vedettes. J’ai quitté Liverpool pour Bolton parce qu’il y avait Jay Jay Okocha. Je ne l’ai pas regretté. Aujourd’hui, il y a beaucoup de joueurs qui veulent venir en Malaisie. Pablo Aymar était là, l’année dernière. D’autres grands joueurs sont annoncés comme Pato.
Vous n’arrêtez de faire état dans la presse sénégalaise de votre désir de revenir en sélection. Mais, c’est certainement pour le fun. Parce qu’à 34 ans révolus, Diouf devrait penser plus à sa reconversion qu’à la rigueur des compétitions africaines ?
Si le Sénégal fait appel à mes services en tant que joueur, je viendrai parce que je sais que je suis toujours bon, voire très bon. Je le montre chaque semaine ici. Je suis meilleur passeur (14 passes décisives) du championnat et deuxième meilleur buteur avec 9 réalisations. Je peux toujours jouer au haut niveau. D’ailleurs, c’est quoi le haut niveau ? C’est d’abord le physique. Je l’ai. Ensuite, c’est le moral. Je suis moralement fort. Je vais le dire en wolof (fu golo daan dem dii wutti ndox, bu deluwate fekkat ci ndox). Je connais la route. On pense que le football est simplement un sport de jeunes. Non ! C’est un savoir, c’est de l’art. Qui se rappelle de Roger Mila quand il était jeune. Il a marqué les esprits à la fin de sa carrière lors de la coupe du monde 1990.
El Hadji Diouf, c’est aussi le bling-bling. Votre côté people vous poursuit où vous allez. Pourquoi, vous ne vous débarrassez pas de cette étiquette de bad boy ?
(Eclats de rires). C’est ça qui fait le charme de Dioufy.
Vous le cherchez alors ?
Non, ce n’est pas que je le cherche. Je joue bien au football. Je flambe (sic). J’attire les autres clubs. C’est pourquoi, mon club n’est pas content. Mais, c’est la loi du sport. En Europe, ce n’est pas un problème. En dehors du terrain aussi, je fais parler de moi. Mais comme on dit : “all the good or bad publicity si only publicity”. Si on me demande de changer quelque chose dans ma carrière, je dirai que je n’ai rien à changer. Au Sénégal, il y a eu certainement des joueurs plus talentueux qu’El Hadji Diouf. Mais, ce que Dioufy a réalisé, ils ne le feront jamais. Et à votre avis, qu’est-ce qui m’a fait gagner tout ça ? C’est mon caractère. Bruno et Bocandé me disaient que tout le monde peut jouer au football, mais ce sont des hommes qui gagnent les matches. Au moment décisif, il faut être un homme.
“Ne me parlez pas de Diambars. C’est un échec.”
Vous voulez dire que c’est ce caractère qui manque aux joueurs sénégalais ?
Je crois bien. Ce qui manque à la sélection sénégalaise, c’est des hommes de caractère. Il nous manque un homme qui dit : «aujourd’hui, c’est un grand jour, je vais montrer de quoi, je suis capable». Personnellement, j’ai toujours aimé les grands matches. Les grands rendez-vous. Je me dis que tout le monde m’attend.
Vous ne pensez pas qu’Aliou Cissé puisse transmettre cette rage de vaincre aux joueurs ?
Le transmettre est une chose. Mais, est-ce que les joueurs sont prêts moralement, physiquement et mentalement ? Le vrai problème du football sénégalais, c’est qu’il n’y a plus de talents. En 2002 ou encore à l’époque de Bocandé et autre Oumar Guèye Sène, il y en avait. Même au niveau du championnat national, on a eu de très grands joueurs avec Lamine Sagna, Lamine Sarr, Cheikh Seck, Samba Fall. Malheureusement, il n’y a plus rien dans le championnat national. Il n’y a plus de talents. Il faut travailler à la base. On semble oublier qu’en 2002, la plupart des joueurs étaient issus des centres de formation depuis le bas âge.
Justement, nous avons quand même Diambars, Aspire, Dakar Sacré Cœur, Génération Foot etc.
(Il coupe). Arrêtez ! Ne me parlez pas de Diambars. C’est un échec. Je suis désolé. Pendant dix, voire douze ans, Diambars n’a sorti que deux internationaux. J’allais même dire un international et demi.
Diambars est quand même un projet à encourager ?
Je n’ai pas fait de centre de formation au Sénégal. J’ai joué dans la rue. Mais, je suis convaincu qu’à notre époque, si nous avions des centres de formation comme Diambars, il y aurait 2000 El Hadji Diouf.
Que reprochez-vous à Diambars ? Qu’est ce qui manque à ce centre ?
Vous êtes journalistes. Quand tu crées un centre de formation et pendant dix ans, tu ne sors que deux joueurs, cela veut dire qu’il y a un problème. Il y a un vrai problème.
Vous avez 34 ans, vous pensez quand même à la reconversion d’ici deux, voire trois ans ?
D’ici deux, trois ans, on verra bien. Je travaille avec mes proches. Il y a beaucoup de choses à faire. Mais on verra le moment venu.
Peut-on s’attendre à voir El Hadji Diouf revenir jouer dans le championnat national comme d’autres internationaux l’ont fait ?
Non ! Je n’y crois pas. Parce que tout simplement, il n’y a pas de terrains.
Quid de la Linguère de Saint-Louis ?
Je pourrais devenir président de la Linguère de Saint-Louis. J’y pense. La ville de Saint-Louis m’a tout donné. Il m’appartient de lui rendre la pièce de la monnaie.
Mais en attendant, est-ce qu’il n’y a pas quelque chose que vous pourrez faire ?
Présentement, je joue au football. Je n’ai pas encore arrêté. Je ne peux pas faire mille choses à la fois. Je me concentre sur mon club et j’essaie de donner du plaisir à mes supporters. Je suis très chanceux. A chaque fois qu’on parle du mal de moi, le lendemain, je réponds sur le terrain.