Me Augustin Senghor est sorti du comité exécutif de la Fsf avec le soutien massif des ligues et des clubs, ce qui renforce la légitimité et la légalité du mandat que le mouvement associatif lui a donné il y a trois ans. Il devrait alors, sur le plan du principe et du respect des textes, être sous les ailes protectrices et de la Caf et de la Fifa, sauf qu’il semble que cette fois, la Caf ne serait pas du côté de la légalité et de la légitimité. Mais la Caf a vraiment bon dos, car chaque fois qu’il y a des problèmes entre le ministère et la fédération ou la fédération et les clubs, on convoque la Caf et la Fifa aux débats qui sont le plus souvent des questions de personnes ou de groupes antagonistes qui sèment la division dans le football sénégalais. Ne serait-ce que lors de cette dernière décennie (2002-2012), il y a eu plusieurs crises qui ont secoué le football. D’abord, dès après la Coupe du monde Japon-Corée, l’Etat a fait une sortie virulente en accusant certains fédéraux d’enrichissement sans cause et voulait leur faire rendre gorge des centaines de millions, retombées de la campagne asiatique. Les clubs s’en sont mêlés arguant que ces retombées devaient profiter au football sénégalais et non finir dans les poches de quelques tristes sires. Mais rien n’y fit ou presque, puisqu’après de vains effets de manches, les « bénéficiaires » s’en tirèrent à bon compte au détriment notre football. Par représailles, l’Etat décida d’être très regardant sur les financements tant que certaines personnes seraient aux affaires. Malgré le bien fondé de cette décision, c’est encore le football sénégalais qui en faisait les frais. Ensuite, il y a eu ce bras de fer entre la Fifa et le ministre Daouda Faye Vava qui, dans sa guerre larvée contre la fédération, prônait la primauté de la loi sénégalaise sur les textes de la fédération internationale. C’était un combat perdu d’avance mais qui a failli la suspension internationale au football sénégalais. Après la campagne moyenne du Caire, celle totalement ratée de Tamalé et la déconvenue face à la Gambie, le football sénégalais va encore entrer dans une crise qui sera fatale à la fédération et à son président Mbaye Ndoye. Mais là, hormis les résultats de l’équipe nationale A, la fédération ne pouvait même pas mettre dans la balance le bon développement du football local et n’avait plus la confiance des clubs et d’une grande partie du mouvement associatif..
La hache de guerre
Aujourd’hui, voilà un Nième bras de fer entre le ministère (l’Etat) et la fédération après l’échec de Bata et l’élimination (et les incidents) face à la Côte d’Ivoire. Tout le monde parle, la main sur le cœur, œuvrer pour l’intérêt du football sénégalais. Pourtant, on a la furieuse impression de revenir 3 ans en arrière, avec la guerre des clans qui avait opposé Me Senghor et Malick Gakou pour la présidence de la fédération. C’est comme si la déconvenue face aux « Eléphants » n’aura été qu’un prétexte pour déterrer la hache de guerre et se remettre en ordre de bataille. Des deux côtés, Primature-Ministère-arbitres, d’une part, et fédération-clubs, d’autre part, ils vont jurer ne voir que l’intérêt du Sénégal et être ombrageux sur leur honneur pour peu qu’on doute un seul instant de leur bonne foi. Cette crise n’est pas dans l’intérêt du Sénégal, loin s’en faut. Les propos désobligeants échangés çà et là et les arguments spécieux développés pour justifier des positions anti- démocratiques ne sont pas de l’intérêt du Sénégal et de son football. La guerre déclarée entre le président des arbitres, Badara Mamaya Sène, et le président de la fédération, Augustin Senghor, avec la décision des arbitres de ne plus officier et la réplique qui est de créer une autre structure arbitrale vont totalement à l’encontre de l’intérêt du Sénégal. Maintenant, ce qui risque de se passer, c’est que, tout en clamant et fort leur amour pour le football et le Sénégal, les protagonistes vont mettre en avant leurs egos, certains surdimensionnés, et aller jusqu’au bout de leur logique pour ne pas perdre la face. Avec quel intérêt pour le football ?.
Instabilité chronique
Depuis l’indépendance, le football sénégalais n’ a fait qu’échouer faute d’unité, de moyens suffisants, de manque de rigueur dans la gestion de ces maigres moyens, de raccourcis pour gagner sans véritable travail de fond, de vraie politique de développement et de querelles personnelles et improductives. Quand une équipe fédérale est au travail, on a comme l’impression que d’autres personnes souhaitent et œuvrent pour son échec pour rapidement prendre la place. De fédérations éphémères, en Cnp, Cng ou comité de normalisation, c’est plutôt l’instabilité chronique qui est la constatant dans notre football, avec son lot de ministres, de présidents de fédération et d’entraîneurs remerciés.
Pendant le dernier tour des éliminatoires de la Can 2013, 15 nations ont raté la qualification. Pour la plus part, elles n’ont pas limogé leur entraîneur et encore moins fait démissionner leur fédération.
L’intérêt du football sénégalais, c’est que tous les segments du football travail à l’unisson dans le même objectif. Sans cette union sacrée, souvent déclarée mais rarement concrétisée, il sera difficile au football sénégalais d’évoluer et d’être conquérant. Cette fédération, qu’elle ait bien ou mal travaillé, a été élue pour un mandat de 4 ans qui finit en septembre prochain. Au lieu de tout chambarder et de tout recommencer, il aurait été plus sage et démocratique d’attendre cette fin de mandat en respectant nos propres textes. En septembre, lors de l’assemblée générale, cette fédération peut bien sauter si elle n’obtient pas la confiance du mouvement sportif et l’Etat pourra alors peser de son poids pour que les choses se fassent selon ses desiderata et placer ses hommes. Comme d’habitude d’ailleurs. Mais malheureusement, l’Etat auquel tout appartient (terrains, avions, argent et sénégalais) veut aller plus vite que la musique, et en voulant atténuer les sanctions de la Caf risque de s’attirer les foudres de la Fifa. Maintenant, on ne va pas épiloguer sur la valeur, la pertinence et la sincérité des arguments de l’Etat (ou ceux qui parlent en son nom) puisque s’il reste sur sa position, c’est finalement la raison d’Etat qui va prévaloir. Sans autre forme de procès, au nom de quel intérêt réel du football sénégalais ? Voire !
Source: Le Soleil