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Voir un tel projet que celui de Diambars aboutir au niveau où il se trouve, au bout de dix ans, relève d’une fabuleuse aventure. Mais c’est avec les décades qui passent et les vérités qui se confirment et se sédimentent que s’écrit la véritable histoire. Diambars a un nom et attend d’avoir une identité, de passer du formel à l’institutionnel, de l’exemple à la référence.

Le processus linéaire qui se trace jusqu’ici à Saly, jalonné d’étapes glorieuses qui ont porté une équipe au firmament,  est d’un bonheur qui semble immaculé. Mais rien n’est abouti qui ne s’est nourri de doutes et de contradictions, de ces écueils sur lesquels les volontés se mettent à l’épreuve pour aller vers le meilleur. Certains sont apparents (le club cherche du renfort extérieur pour l’Afrique), d’autres sont sans doute cachés et tiennent aux faiblesses liées à toute œuvre de construction humaine.

La question fondamentale, et d’intérêt collectif, n’est pas en Diambars lui-même. Elle se trouve dans le chemin qu’il semble ouvrir pour l’évolution du football sénégalais.

Les écoles de football de type nouveau, qui ont commencé à se développer depuis les années 1990, quand «Souris» lançait le centre Aldo Gentina, ne comblaient pas un vide. Elles offraient une approche plus formelle d’un apprentissage dont le b.a.-ba était déjà là, dans un environnement de libre expression.

Les vieilles gloires vous racontent leur rapport avec le papier journal enroulé dans un morceau de tissu et consolidé avec un rouleau de ficelle, pour leurs premiers entrechats. Il y a eu ensuite le tengs qui a servi aux laborieuses tentatives de jongleries, jusqu’aux ballons casa avec lesquels on a armé les premiers tirs, affiné la technique et lancé les premiers «attaquements».

Dès cette adolescence pubère, on connaissait les petits génies, les pieds carrés laborieux, ceux qui tiendront les maillots et les chaussures pour les jours de match et le clan des gros bras chargés de gérer les troisièmes mi-temps, quand tout finissait dans la mêlée générale. Sans aucune préparation spécifique ou spéciale, le talent opérait sa sélection naturelle.

La suite n’allait pas s’inscrire dans un processus plus élaboré, même si la troupe n’était plus simplement une vague de gosses courant dans tous les sens et tapant dans toutes directions.

C’est à ce moment qu’apparaissait le Ferguson du coin. Parfois, diplôme de moniteur en poche, le plus souvent armé de sa seule audace nourrie par les débats au coin de la rue, mais surtout disponible pour faire le porte-à-porte, ramasser la troupe et la lancer dans un terrain vague, pour gueuler ses instructions. Educateur, encadreur, mais surtout grand frère.

De cette formation sur le tas, quand Dakar respirait à travers des terrains vagues qui étaient autant d’espaces d’évasion, sont sortis les joueurs les plus aboutis du football sénégalais depuis ses origines. En talent pur comme en intelligence du jeu.

Mais ce qui se construit depuis une vingtaine d’années n’est pas négligeable. Une bonne partie des mondialistes de 2002 a fait ses premières armes à Aldo Gentina, comme Salif Diao, Moussa Ndiaye, Tony Sylva, Amdy Faye et Souleymane Camara. Les olympiques qui ont brillé aux Jo de Londres avaient pour la plupart leur ancrage à Diambars avec Gana Guèye, Kara Mbodj, Souaré, Ousmane Mané et Saliou Ciss.

En vingt ans et toujours au bout de dix ans d’évolution, ce sont là les deux trajectoires qui ont mené le football sénégalais à ses plus hautes cimes.

Les résultats sont là, produits d’une formation méthodique, plus adaptée aux réalités actuelles du haut niveau, mais malheureusement pas assez généralisée pour créer une masse critique à même d’impulser un élan d’ensemble pour le football sénégalais.

Diambars peut se développer, il ne fera pas le printemps du football sénégalais. Sa vocation première ne l’y appelle d’ailleurs pas. Il s’agit plutôt d’une responsabilité d’Etat.

Diambars rassure cependant en ce qu’il travaille sur des bases qui tiennent mieux compte des paramètres de développement et d’épanouissement du footballeur. Notamment l’évolution avec l’âge.

Car, quand des trentenaires affichent la vingtaine sur le papier, on comprend les trous d’air que peut subir l’équipe nationale à chaque fois que certains de ses «Européens» doivent se mettre à l’heure africaine.

L’histoire du football sénégalais a souvent été celle de cadets surclassés juniors, de juniors propulsés seniors et d’internationaux qui entrent dans la «Tanière» à 19-20 ans, voire 17 ans. Ce faisant, il ne s’agissait pas de forcer le développement du joueur, mais de consacrer une maturité précoce et naturelle. La rue faisait grandir dans un processus d’apprentissage qui, bien que mal structuré, offrait un cadre de pratique où la règle du jeu était le jeu, la finalité le jeu et où un rabatteur ne guettait pas au point de corner pour faire main basse sur le produit et le formater en produit d’exportation.

Diambars ne rassure pas uniquement de par le processus physique, mental et technique qui sert de socle à son travail. Il fait plaisir par les orientations données à son labeur. Quand on a vu à l’œuvre les Bachir Sarr, Gaucher Paye, Big Boy, etc., à qui il revient de mettre les jeunes de ce centre dans les chemins de la rationalité footballistique et de leur faire sentir ses complexités, on ne peut s’étonner de ce qu’ils savent faire.

Aucun doute, l’élève est dans le maître.

 

Waasport

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