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Les Lignes de Tidiane Kassé

La Saison 2 d’Alain Giresse s’ouvre dans des circonstances moins traumatiques que l’acte 1. On se rappelle les conditions dans lesquelles il est arrivé à la tête de la sélection nationale. Il fallait alors ramasser des morceaux éparpillés par les Ivoiriens, recoller un puzzle dont on avait du mal à distinguer les contours, remettre en équilibre un ensemble qui avait perdu son âme et son souffle.

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Traumatisé par l’échec de la Can 2012, assommé par l’élimination de la Can-2013, chahuté par un public meurtri, le football sénégalais renvoyait l’image d’un navire à la dérive, balloté par une tempête que ceux qui tenaient la barre subissaient à tous les coups.

La remise à flot a pris du temps. Parfois le nouveau maître à bord a semblé se perdre dans ses compas et dans la lecture de sa lecture, tandis que sa ligne d’horizon s’évanouissait dans le creux des vagues. On l’a vu barrer à bâbord quand on l’attendait à tribord.

Parfois il a descendu les voiles quand on pensait que les vents favorables devaient porter l’équipe nationale à surfer sur les vagues pour aller à l’offensive. Mais à force de jouer avec les courants marins, Giresse a fini par trouver la ligne de navigation qui semble mener vers les îles du bonheur.

Un an plus tard, le Sénégal a ainsi trouvé le groupe qui fédère les esprits autour de ses qualités, réchauffe les cœurs par sa volonté et sa détermination, réconcilie les âmes pures autour de son intelligence du jeu.

Un an plus tard on a ce match-référence-de-Marrakech qui donne le sentiment de ne plus continuer à se perdre dans les chemins d’une errance aveugle, perdu dans le choix des hommes, les orientations à prendre sur le terrain et le sens de la démarche à adopter.

Un an plus tard, on a Sadio Mané… On aime les footballeurs qui peuvent résumer un match à leur propre dimension et on espère que le bonheur qu’on anticipe avec lui ne sera pas vain.

Bien sûr qu’il ne suffit pas d’un soliste pour avoir un ensemble philarmonique. Bien sûr que le temps à encore à juger son œuvre pour certifier sa dimension exceptionnelle. Mais il est certain qu’on ne tourne pas en bourrique le Bayern par 3-0, même en match amical, sans posséder quelque chose qui tient du surdimensionnel. Sadio Mané l’a réussi en janvier dernier avec Salzbourg. Il est de la même évidence qu’on n’humilie pas l’Ajax en Ligue des champions (3-0), dans son antre de l’Amsterdam Arena, sans avoir une ardente flamme intérieure. Et quand on connaît ce qu’a représenté l’Autriche dans l’évolution historique du football mondial (cela a été souligné dans cette chronique), on apprécie davantage la fulgurance de Sadio Mané dans une équipe de Salzbourg où il fait partie de ceux qui battent la mesure et donnent le tempo.

A Marrakech il y avait Sadio Mané, mais c’est la cohérence d’ensemble qui fut remarquable. En continuant à user du même fil pour poursuivre son œuvre, Alain Giresse confirme qu’il est dans des certitudes qui lui ont naguère manqué.

Les 23 «Lions» appelés à rencontrer le Mali, le 5 mars prochain, à Paris, installent une cohérence dans la démarche. Mais le plus important reste la vision du sélectionneur national. Elle est moins dans le choix du groupe d’ensemble qui n’est qu’un concept globalisant, que dans l’expression du jeu et dans les hommes appelés à porter cette vision.

Fut-il un match amical, le rendez-vous à venir contre le Mali est d’un symbolisme important. On a besoin de revivre les sensations récentes pour entretenir la flamme et nourrir le rêve. On a envie d’aimer encore plus les «Lions» dans la perspective d’heureuses retrouvailles avec un Stade Senghor enfin aux normes, quand démarreront les qualifications pour la Can-2015.

Le tirage au sort du 27 février indiquera les lignes du futur, mais avec les acquis de Marrakech et les bonus attendus de Saint-Leu-La-Forêt on peut tuer les peurs du passé et regarder l’avenir avec l’optimiste de la foi retrouvée. Non pas que tout devienne possible, mais que le meilleur soit envisageable quelle que puisse être l’adversité.

La confiance en l’avenir repose sur les axes de régénération qui se dessinent dans la «Tanière». En défense et au milieu de terrain émerge une jeunesse dont le potentiel de progression s’avère intéressant. L’attaque tarde à se renouveler, témoignant encore du manque d’audace qui caractérise Giresse. Mais c’est à partir de la défense et des lignes intermédiaires qu’une équipe se construit et c’est à ce niveau  que les influx positifs se sont le plus fait sentir à Marrakech.

Il a fallu du temps pour que Sadio Mané soit reconnu à sa véritable dimension, on espère que Diafra Sakho ne dépérira à force d’attendre pour apporter du souffle à l’attaque. Car il y a des moments où il faut impulser le déclic qui fait grandir le footballeur. Plus tôt ou plus tard, l’histoire n’est plus la même.

Giresse à un bon filon entre les mains. Pourvu qu’il ne perde pas les chemins dorés.

 

Waasport

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