Le Sénégal, emmené par un sélectionneur expérimenté et un effectif brillant, peut créer la surprise à l’occasion de cette CAN 2015. A condition de ne pas se laisser ronger par les problèmes internes.
Si l’on se fie aux éléments purement sportifs, le Sénégal a tout pour être heureux : une qualification pour la CAN 2015 acquise de haute lutte, un effectif ultra talentueux, un groupe sain dirigé de main de maître par Alain Giresse et des infrastructures chaque jour plus professionnelles. Suivant cette logique, les Lions de la Téranga devaient donc se présenter en Guinée Equatoriale le sourire aux lèvres, prêts à créer la sensation dans le groupe de la mort, aux côtés du Ghana, de l’Algérie et de l’Afrique du Sud. Seulement, en quelques semaines, l’ambiance s’est « légèrement » dégradée. Cela a commencé fin décembre lorsque le sélectionneur français a publié sa liste de 28 joueurs dans laquelle ne figurait pas Demba Ba, pourtant en pleine bourre avec Besiktas. Par presse interposée, l’attaquant et l’entraîneur vont se livrer à une guerre larvée, le premier accusant le second d’être « téléguidé » par le président de la fédération, Augustin Senghor, avec lequel il entretient des relations exécrables. « On a l’impression d’avoir plus affaire à une marionnette qu’au coach d’une équipe nationale, a violemment lâché l’ancien avant-centre de Chelsea au journal Stades. Quand on voit certaines décisions dans cette équipe, on se dit que ce n’est pas lui qui les prend. Et j’ai des preuves. »
Et Giresse de rétorquer lors d’une interview accordée au quotidien algérien Compétition : « Je rappelle que nous avons livré six matchs dans les qualifications et que nous en avons gagné quatre sans lui. Bon, je crois que ça vous a échappé. L’entraîneur a quand même le droit sportif de faire ses choix, cela existe. » Affirmatif. Surtout que l’ex-membre du carré magique n’a pas eu seulement ce paramètre à gérer. En disgrâce auprès des journalistes locaux, il ne s’exprime plus que dans les médias étrangers. Après la rencontre amicale remportée face au Gabon (1-0), début janvier, il ne s’est pas présentéen conférence de presse, préférant envoyer à sa place le directeur technique national, Mayacine Mar. Enfin, Giresse a également dû s’occuper des blessures de ses deux « British », Sadio Mané et Diafra Sakho. Le deuxième, poussé par West Ham, a choisi de ne pas faire constater son indisponibilité par les médecins de la sélection ce qui a provoqué le courroux de la Fédérations Sénégalaise de Football (FSF) qui a porté l’affaire auprès du tribunal de la FIFA.
Défense d’entrer
Toutes ces péripéties pourraient presque nous faire oublier l’excellente forme du Sénégal, la seule sélection du Groupe C à ne jamais avoir remporté la Coupe d’Afrique. Depuis septembre, les Lions enchaînent les prouesses à l’image de leurs éliminatoires probants où ils ont battu l’Egypte à deux reprises pour conclure juste dans le sillage de la Tunisie au classement. Mieux, sur les six rendez-vous disputés, l’équipe n’a encaissé qu’un but en 540 minutes. Pas mal pour une sélection décrite comme offensive. Lors des amicaux préparatoires, le staff s’est justement attelé à régler les derniers détails tactiques afin d’optimiser le passage de la défense à l’attaque. Une réussite notamment face à la Guinée (5-2), transformée en punching ball. « Le plus important, ce n’est pas le résultat du match, mais son contenu, a analysé Alain Giresse. Nous avons vu des joueurs concentrés tout au long de la rencontre. Ils en voulaient et ont pris leurs responsabilités, une fois sur le terrain. L’essentiel, c’est d’être prêt le jour J. »
Afin d’honorer les objectifs fixés par le patron de la FSF. «Le premier objectif est de prendre part aux quarts de finale en arrivant à sortir de la poule C très relevée, affirme M. Senghor. A partir de là, l’équipe jouera le coup à fond pour aller le plus loin possible dans la compétition. Nous avons désormais une équipe conquérante, quel que soit le niveau de l’adversaire. En dehors du talent des joueurs qui la composent, cette équipe recèle en elle trois qualités: sa sérénité, son humilité et sa grande force de caractère.» Malgré le contexte, le Sénégal avec son effectif de rêve (Cissé, Sow, Diouf, Sané, Mané, Ndoye) s’est en tout cas donné les moyens de briller en Guinée Equatoriale grâce à une une préparation aux petits oignons réalisée au Maroc selon la volonté de son entraîneur. « Il y a très peu d’équipes africaines qui se préparent chez elles, a justifié l’ancien technicien du PSG au journal sénégalais Sud Quotidien. J’ai fait deux CAN et je les ai préparées à l’extérieur, justement pour trouver le calme, éviter la pression. Ce n’est pas au milieu des supporteurs que l’on trouve les meilleures conditions. Il faut de la sérénité et de la quiétude. Les joueurs ont besoin de travailler, de récupérer. » Et comme toujours, seuls les résultats enregistrée à Mongomo, lieu de résidence, valideront cette thèse. Ou non.