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“Pour la première fois, tous les footballeurs et les anciens du foot, les journalistes, on a tous tiré du même côté.”

“Au niveau du potentiel, il y a effectivement des joueurs qui m’ont marqué dans cette équipe.”

A Dakar pour les besoins du Chan U20, Diomansy Kamara s’est dit impressionné par la qualité des joueurs de l’équipe de Joseph Koto. Selon l’ancien international, qui s’est confié au Quotidien (avant la finale), l’avenir du football sénégalais a de beaux jours.

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Qu’est-ce qui explique votre séjour au Sénégal ?
Si je suis là, c’est pour le Chan U20. J’ai rompu mon contrat en janvier dernier avec mon club. Il y avait cette opportunité de pouvoir venir suivre l’évolution du football sénégalais et les jeunes. J’avais du temps de libre et j’ai parlé avec Me Augustin Senghor (président de la Fédé foot) qui m’a gentiment invité à venir suivre le Chan. Je suis donc venu voir comment se déroulait un peu la compétition.

Pourquoi avoir décidé de rompre votre contrat ?
En janvier, j’ai eu des offres, mais j’avais besoin de faire un break. Je suis reparti dans mon premier club. C’était quelque chose à laquelle, je tenais. Celui-là même qui m’a donné la chance d’être professionnel : c’est Catanzaro, en Italie. C’est mon premier club professionnel quand j’avais 18 ans. C’est celui qui m’a lancé et qui m’a donné la chance d’être professionnel. Je suis donc reparti là bas. Malheureusement, les objectifs n’ont pas été atteints. Et j’étais vraiment parti là bas pour gagner le championnat. A partir du moment où on ne pouvait pas gagner le championnat, je ne me voyais pas continuer. J’ai donc rompu mon contrat.

Qu’est-ce qui vous a poussé à vous orienter vers la petite catégorie ?
J’ai envie de travailler avec les jeunes. Au départ, je suis quelqu’un qui aime les jeunes, la formation. C’est vraiment sur cet accent que j’aimerai travailler. Je suis quelqu’un qui fait pas mal de social. J’aimerai pouvoir donner l’opportunité aux jeunes de profiter de mon expérience, de mon savoir-faire et de mes contacts. Aujourd’hui, on parle beaucoup de l’Equipe nationale A, de reconstruction, mais je pense ça passe également par les catégories jeunes. L’Equipe nationale A est certes une vitrine, mais il y a beaucoup de talents chez les petites catégories et j’aimerais pouvoir être cette rampe de lancement pour les jeunes au Sénégal.

Vous avez eu l’occasion de suivre le Chan. Y a-t-il des ­jeunes qui vous ont impressionné ?
Au niveau du potentiel, il y a effectivement des joueurs qui m’ont marqué dans cette équipe. Il y a le petit Ibrahima Wadji, j’ai beaucoup aimé ce joueur. Le numéro 8 (Sidy Sarr) également a fait un bon tournoi. Le 14 (Moussa Koné) de Dakar Sacré-Cœur est aussi un très bon joueur. Et j’ai eu vraiment un coup de cœur pour le numéro 15 (Moussa Wagué), le petit latéral de Aspire. Très jeune, très bon et je pense qu’il peut même aspirer à jouer en Equipe nationale A dans les années à venir.

Dans l’ensemble, vous êtes satisfait du Chan…
Oui. Certes on a pris énormément de buts. On aurait pu mieux faire, mais l’essentiel d’un tournoi c’est d’aller en finale. Et les gamins l’ont réussi. On a sous la main une équipe d’avenir. Pour l’organisation, tout s’est bien passé.

Est-ce que dans ce nouveau projet, c’est seulement le Sénégal qui vous intéresse ?
Je suis Sénégalais. Donc, je vais me concentrer sur le Sénégal. Je suis Sénégalais et Panafricain et je suis pour le retour aux sources des valeurs sûres. Aujourd’hui, je veux donner mon expérience au Sénégal. J’aurais bien pu aller vivre à Paris, à Londres, à Istanbul. J’ai pas mal bougé. Là, j’habite avec ma femme à Rome. On a pris la décision de revenir en Afrique.

Est-ce que vous avez un autre projet au-delà de votre nouveau rôle d’agent de joueurs ?
Dès que j’ai arrêté, on m’a proposé d’être consultant. Mais, je ne me voyais pas dans ce milieu. Je ne me voyais pas aller commenter des matches. J’aime le terrain, donner la chance aux jeunes. Etre entraîneur non plus, ce n’est pas quelque chose qui me plaît. Vous savez, j’ai eu des propositions pour continuer à jouer. Pour moi, ma carrière est derrière moi. Là, c’est travailler pour les jeunes et si on peut ouvrir d’autres centres comme Dakar Sacré-Cœur, ce serait pas mal. J’espère pouvoir trouver des talents comme El Hadji Diouf, Kalilou Fadiga à Dakar, en Casamance, à Saint Louis, dans les coins reculés du Sénégal. Mon terrain ne sera pas seulement Dakar, je vais bouger, aller dans les régions et essayer de dénicher des talents inconnus. Babacar Khouma (attaquant de la Fiorentina) est un parfait exemple. Il n’a jamais fait les sélections de jeunes. Il est parti très jeune en Italie et aujourd’hui, c’est l’un des meilleurs attaquants en Série A. Il a à peine 21-22 ans. C’est ce genre de talent que j’aimerais découvrir. Le talent au Sénégal, ce n’est pas ce qui manque.

Au-delà du monde du foot, vous vous activez énormément dans l’humanitaire. Par contre, on ne vous entend plus beaucoup dans ce domaine ?
J’ai été pas mal pris par mes projets divers. Je bosse pas mal avec l’Empire des Enfants. L’humanitaire fait partie de ma vie au quotidien. Je suis toujours à l’Empire de Enfants. C’est difficile de s’éparpiller, je travaille avec la seule structure. D’ailleurs, il y a un grand événement au Grand Théâtre, le 30 avril pour une levée de fonds et je serai présent. J’appelle le plus de monde à venir apporter leur contribution. Il y aura un dîner de charité en juin à Londres. C’est dans le but de leur trouver un nouveau lieu d’accueil. Je parraine deux enfants là-bas depuis deux à trois ans (Oumar et Yaya). Des gamins qui ne parlaient même pas français. Quand on voit le travail qui a été fait, c’est vraiment bien. Il y a pas mal de joueurs qui sont impliqués comme Moussa Sow, Demba Ba, Issiar Dia, Jacques Faty, qui aident beaucoup. J’ai une super collaboration avec la directrice du Centre, Anta (Mbow). C’est quelque chose qui me tient à cœur, à moi et à ma femme. Malheureusement, ils vont être délocalisés.

Durant la carrière, quels ont été les moments de bonheur ?
C’est mon premier match en Série A. C’était un très grand moment, le premier match contre la Roma. Un moment aussi que je n’oublierai jamais, c’est la première fois que j’ai porté le maillot de l’Equipe nationale du Sénégal. Ce sont des moments qu’on n’oublie jamais, jouer en Premier League en Serie A, jouer des coupes d’Afrique. Je n’ai pas de regrets vraiment. Si on m’avait dit à 18 ans que j’aurais eu cette carrière là je ne l’aurais pas cru. J’ai beaucoup travaillé et je remercie beaucoup le bon Dieu pour tout ce qu’il m’a donné et à ma famille. Certes, il y a eu des déceptions comme tout le monde. Je me suis cassé le genou. J’ai eu du mal à revenir. Cela m’a pris du temps. J’ai eu trois opérations, c’est un peu cela qui m’a handicapé pour le reste de ma carrière. Mais je n’ai pas de regrets, j’ai travaillé… Je suis quelqu’un de croyant. Cela devait arriver. Je me suis battu, c’était un mal pour un bien. Le bon Dieu éprouve celui qu’il aime et il m’a éprouvé par ces blessures. Et cela m’a permis de grandir, de découvrir une autre manière de travailler.

Y a t-il un championnat qui t’a marqué ?
Oui, la Premier League. c’est le plus beau championnat au monde. Pour moi, le football, c’est l’Angleterre. Aussi bien au niveau de la passion, de l’engagement, du jeu. En Angleterre, ils adorent le football. Il n’y a pas de violence et c’est ce qui m’a marqué.

Et le club ?
Je dirais Fulham. Je suis resté 4 ans là-bas. J’étais à Londres, j’ai joué la Coupe d’Europe là-bas. On est allé jusqu’en finale de Coupe d’Europe. J’ai été transféré à 12 millions d’euros. C’est vraiment le club qui m’a le plus marqué dans ma carrière.

Vous avez décidé de venir vous installer au Sénégal. Pourquoi ?
Après avoir tourné pendant 15 ans, je pense que le Sénégal c’est ce qui correspond le mieux à mon signe de vie. Déjà en étant musulman donc c’est important pour moi de vivre dans un pays musulman. Aujourd’hui, Dakar m’offre cette opportunité de pouvoir éduquer mes enfants dans la religion musulmane. La qualité de vie qu’on a à Dakar, on n’a rien à envier à d’autres personnes qui sont en Europe. C’est vraiment l’endroit où ma femme et moi nous nous sentons bien. Et même mes enfants, je les ai habitués à venir fréquemment ici. J’ai deux petites filles. C’est important qu’elles aient ces valeurs là. C’est dès le plus jeune âge qu’on doit leur inculquer certaines valeurs et je pense même qu’elles pourraient grandir en Afrique et même faire leurs études ici. Cela leur rendra plus forte à l’avenir. On est en train de s’organiser pour l’inscription des enfants à l’école. Inchallah, début juillet ou mi-août, pour la rentrée de septembre, on sera à Dakar.

Quelle appréciation faites-vous de la nomination de Aliou Cissé sur le banc des Lions ?
On a toujours réclamé Aliou Cissé en tant que coach national. Je fais partie de ces gens-là. Vu l’homme, c’était la personne adéquate pour l’Equipe nationale. Il va falloir qu’il comprenne aussi que, ce n’est pas parce qu’il est Sénégalais que les gens ne vont pas le critiquer. Ce sont les résultats du terrain qui font faire que Aliou sera apprécié ou pas. C’est un très grand joueur qui a beaucoup fait pour son pays. Mais c’est le plus grand défi qu’il va relever. Il a les capacités, mais il va falloir qu’il le démontre sur le terrain, qu’il arrive à faire l’union sacrée autour de l’Equipe nationale.

Vous auriez aimé intégrer ce staff ou travailler dans l’environnement ?
Je serai à côté quoi qu’il arrive. On est tous à ses côtés dans le même sens. On l’a vu avec ce Chan des jeunes. Pour la première fois, tous les footballeurs et les anciens du foot, les journalistes, on a tous tiré du même côté. Et on a vu le résultat. Si on arrivait à faire la même chose avec l’équipe A, ce serait bénéfique pour tout le monde. Il y a des places pour tout le monde. On n’a pas besoin d’être à côté de Aliou Cissé pour intégrer le staff. Il y a Kalilou Fadiga qui est ici, Salif Diao, Ferdinand Coly, Lamine Diatta, Tony Silva, moi… On n’a pas besoin d’avoir une fonction officielle pour être à ses côtés et donner notre avis. Que le Sénégal puisse dans les années à venir réaliser de grandes choses. On a énormément de talents et j’espère qu’enfin, on va tous tirer du même côté.

Un conseil à Aliou Cissé…
Je ne donne pas de conseil. Aliou est une grande personne. C’est un grand-frère. Il connaît le pays mieux que quiconque. J’ai toujours été pour l’expertise locale. On a vu l’exemple avec Alain Giresse qui part et qui tire sur le Sénégal. C’est de la malhonnêteté intellectuelle. Quand on a des choses à dire, il faut le dire directement. Des personnes comme Kasperczak aussi en 2008, qui prend son avion et rentre après le deuxième match. Ce n’est pas correct. Je crois à l’expertise locale et que dans les années à venir on aura beaucoup plus d’entraîneurs africains au rang de sélectionneurs et qu’on arrivera à gérer nous-mêmes notre propre football.

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