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Capitaine relégué sur le banc, légèrement pris en grippe par une partie du public de Léopold Sédar Senghor face à l’Egypte, victime de la concurrence et de sa polyvalence en club avant de s’exiler, Mouhamed Diamé est passé par toutes les émotions ces derniers mois. Pas loin de toucher le fond il y a quelques semaines, le voilà avec tous les voyants au vert à la faveur d’un transfert de West Ham à Hull City qui lui a fait retrouver le sourire, sa position préférentiel et le chemin des filets. De quoi lui faire retrouver une place de titulaire en équipe nationale, au moment où Cheikhou Kouyaté qui l’a remplacé à West Ham et dans le onze de l’équipe nationale déclare forfait pour les deux prochains matches des Lions. Finalement, Mouhamed Diamé, une équation à plusieurs inconnues ? Pour y voir plus clair, nous avons donné la parole à Amara Traoré, qui l’a découvert et sélectionné pour la première fois en équipe nationale, et à Alain Giresse, qui a gardé foi en lui l’a confirmé capitaine des Lions malgré une mauvaise période. Décryptage de la trajectoire d’un joueur qui marche à l’affectif.

POIDS PSYCHOLOGIQUE DES RESPONSABILITES EN EQUIPE NATIONALE

CONTEXTE : Mohamed Diamé a connu sa toute première sélection le 26 mars 2011, lors de la réception du Cameroun (victoire des Lions 1-0, sur un but de Demba Bâ) dans le cadre des éliminatoires de la CAN 2012. Alors entré en jeu, il avait déjà fait montre de quoi séduire le versatile public de Senghor : style de jeu box-to-box, longues passes réussies et tirs à mi-distance, la panoplie qui manquait tant au jeu des Lions. Surtout, il intègre la Tanière à une période où elle regorge de plusieurs leaders de vestiaires et autres meneurs d’hommes de la trempe de Mamadou Niang, Souleymane Diawara, Kader Mangane, ou encore Malickou Diakhaté. Suffisant pour être bien couvé et progresser au sein d’un groupe qui réussit le meilleur parcours en éliminatoires de l’histoire du Sénégal. Pour Diamé, tout va pour le mieux. Jusqu’au moment où, à la faveur (ou la défaveur) d’une Coupe d’Afrique 2012 catastrophique, le bleu de la Tanière devra endosser des habits de leaders quand tous les autres «cadres de Bata» sont “expulsés” manu militari de la sélection. Le sélectionneur Amara Traoré est limogé, les leaders rasent les murs, et parallèlement, les Olympiques émergent.

Aux Jeux Olympiques de Londres qui se tiennent dans la période où les joueurs sont tous en vacances d’été, le Sénégal sollicite plusieurs joueurs de la sélection A pour accompagner les Lionceaux engagés dans le tournoi olympique. Tous déclinent l’offre, sauf Mohamed Diamé, qui se voit ainsi confier le brassard de capitaine par le duo Karim Séga Diouf – Aliou Cissé, pour guider la bande à Cheikhou Kouyaté, Zargo Touré, Pape Souaré, Gana Guèye, Sadio Mané, Moussa Konaté, qu’il retrouvera plus tard en équipe A. Pour reconstruire sur le tas de ruines laissés par la CAN 2012, Joseph Koto promu sélectionneur, ne trouve pas de piliers sur lesquels se baser. Mohamed Diamé se porte volontaire est le seul qui acceptera de revenir jouer un match amical au Niger, le 14 novembre 2012. En moins d’un nouveau capitaine est né. La succession de ces évènements en un temps record a augmenté le poids des responsabilités sur les épaules d’un binational (né à Créteil le 14 juin 1987, formé à l’INF Clairefontaine) qui a réellement découvert son pays d’origine lors de sa toute première sélection, un an auparavant. Trop de responsabilités qui ont pu l’inhiber et déteindre sur ses performances ? Qu’en pense celui qui l’a fait venir en équipe ?

Amara Traoré : « Une vague d’émotions difficiles à supporter »

« Son problème, est plutôt psycho-sociologique. Il y a eu beaucoup d’attentes en lui. Peut-être un peu trop. La pression a été énorme sur ses épaules et certains évènements se sont enchaînés en un temps record. Cela a pu déclencher une vague d’émotions difficiles à supporter chez lui : la première sélection, la Can ratée, les Jeux Olympiques, le brassard en sélection… Tout cela en un an. Il n’a pas eu de repos en 2012 à cause des JO pour lesquels il a accepté d’accompagner les moins de 23 ans de l’époque. J’ai l’habitude de dire que la récupération est une forme d’entraînement. Quand un joueur rate la trêve hivernale, il retrouve difficilement sa forme. En 2012, il a disputé la Can en janvier, une saison complète en club, avant d’enchaîner avec les JO et la saison suivante. Le fait de ne pas jouer ces derniers temps lui a permis de mieux récupérer et de retrouver toute sa fraicheur mentale et physique. On voit les résultats aujourd’hui. Il lui fallait digérer tout ce qui s’est passé.»

Alain Giresse : « Un leader important »

«Au niveau de l’état d’esprit, Diamé est quelqu’un d’extraordinaire. C’est un vrai professionnel, avec beaucoup de sérénité et de sagesse. C’est vraiment un leader important sur lequel on peut s’appuyer. Ses coéquipiers aussi savent compter sur lui. On peut dire que c’est relai idéal dans un groupe.»

CHANGEMENT DE CLUB ET REPOSITIONNEMENT TACTIQUE

CONTEXTE : La polyvalence a ses vertus. Ses désavantages aussi. Mohamed Diamé en aura plus souffert, ces dernières périodes. Au point d’en faire la raison première de son transfert de West Ham à Hull City. «A West Ham, j’étais trimbalé à tous les postes, je me rappelle qu’une fois, j’ai joué comme attaquant, se lamentait-il lors du dernier regroupement des Lions, pour expliquer son changement de club. Ce n’était pas bien pour ma carrière. Là (à Hull) au moins, je suis sûr de jouer à mon poste. Il n’était pas possible d’intéresser les plus grands parce que quand ils viennent me voir, il se trouve qu’on me met à un poste qui n’est pas le mien. Quand tu es trimbalé à tous les postes, tu manques de repères et ça ne m’aide pas dans ma volonté de changer de cap en évoluant dans un grand club mais aussi dans mes performances en équipe nationale.» Le morceau est lâché. Assez honnête pour reconnaître que ses dernières prestations en sélection étaient assez décevantes, le capitaine donne une raison plausible pour expliquer sa méforme. Un argument d’autant plus convaincant que son passage de West Ham à Hull City l’a métamorphosé. Fixé au cœur du jeu, au poste de milieu relayeur, ses performances parlent pour lui : 2 titularisations en 2 matches, 2 buts (dont l’un inscrit contre son ancien club) tous inscrits de l’extérieur de la surface, 87,7% de passes réussies, 100% de réussite sur les tirs… La totale ! Comment un changement de club et un repositionnement tactique peuvent à ce point métamorphoser les performances d’un joueur ? La question est posée à Amara Traoré, mais aussi à Alain Giresse, son actuel entraineur en équipe nationale. Eléments de réponse.

Amara Traoré : « Il est taillé pour évoluer au centre »

« Quand je le supervisais pour la première fois, en Angleterre, il évoluait à Wigan. C’était lors d’un match contre Manchester City. Il avait éclaboussé cette rencontre de son talent. Il avait joué dans une position centrale. Il avait fait preuve d’un réel impact, était présent à la récupération et éclairait le jeu par son jeu long. C’est son profil. Il est taillé pour évoluer au centre, comme un box-to-box. Ce n’est pas étonnant qu’il préfère évoluer dans ce rôle. Il a un gros volume de jeu et il a beaucoup de générosité. Ce match contre City, il l’a terminé en défense centrale. Il a de bonnes qualités offensives, avec un double changement de jambes terrible, moi même je l’ai utilisé en milieu offensif lors d’un match amical contre le Maroc. Sa polyvalence peut toujours servir, mais si à cause de ses qualités il fait un tour dans tous les autres postes, ça peut finir par lui faire perdre des repères. Il a plus le profil d’un relayeur.

Alain Giresse : « Il a besoin de jouer là où il s’exprime le mieux »

« C’est compréhensible que la raison qui lui fasse changer de club soit de retrouver un poste stable. Il était trimballé à tous les coins à West Ham. Il a besoin de jouer là où il s’exprime le mieux, c’est-à-dire dans l’axe. Là, c’est tant mieux pour lui et pour le sélectionneur que je suis, c’est toujours mieux de pouvoir compter sur des joueurs qui sont tous en forme. Je préfère avoir 23 joueurs en forme que le contraire.»
ET MAINTENANT ?

CONTEXTE : Tout semble plaider en la faveur d’un retour au premier plan pour Mohamed Diamé. Au-delà de ses performances remarquables en club, il y a surtout le fait que le joueur qui a profité de sa relégation sur le banc, Cheikhou Kouyaté, est blessé et forfait pour la double confrontation contre la Tunisie.

Amara Traoré : « Diamé, c’est un bonheur dans une sélection »

«C’est un joueur qui n’a jamais perdu son talent. Et son intelligence fait qu’il a toujours accepté les critiques de façon très positive. La preuve, à chaque qu’on a eu besoin de lui, il a répondu présent. On l’a mis sur le banc, mais il a continué à rassembler. Ses discours sont toujours positifs.  Pour un entraineur, Diamé, c’est un bonheur dans une sélection et il sera difficile pour un entraineur de se passer de ses services.»

Alain Giresse : « S’il n’a pas joué les deux derniers matches…»

«Je ne vous dirai pas s’il sera titulaire ou pas. Il revient en forme. Il avait besoin de temps de jeu. Il n’a pas démarré la saison normalement. Il avait besoin de retrouver du rythme. Il a de très bonnes sensations en ce moment. S’il n’a pas joué les deux derniers matches, c’est qu’il n’avait pas assez de compétition dans les jambes. Vous indexez ces contre performances, mais elles ne sont pas aussi importantes à mes yeux. On ne peut pas citer beaucoup de matches pour lesquels il est passé à côté.»

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