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Poussé vers la sortie à Dijon, Moussa Konaté est prêté jusqu’à la fin de la saison à l’Espérance de Tunis. Une nouvelle destination et un épisode de plus dans la carrière de l’avant-centre international sénégalais qui connaît une chute libre depuis sa révélation aux JO 2012 de Londres.

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Un nouveau point de chute pour Moussa Konaté. Après une saison poussive à Dijon où il n’entrait plus dans les plans de l’entraîneur David Linarès (remplacé par Patrice Garande), l’attaquant international sénégalais (32 sélections, 12 buts) va évoluer sous les couleurs de l’Espérance de Tunis pour la saison 2021-2022. Le club tunisien a officialisé hier son arrivée dans le cadre d’un prêt payant pour une saison avec option d’achat. La formation maghrébine est également disposée à prendre en charge l’intégralité du salaire du joueur qui n’a joué aucun match en Ligue 2 depuis le début de la saison. Sous contrat avec Dijon (Ligue 2) jusqu’en juin 2023 et auteur de 5 buts en Ligue 1 la saison dernière, l’ancien joueur d’Amiens s’apprête à découvrir un nouveau championnat. Un choix validé par Serigne Saliou Dia. «L’Espérance de Tunis est un club qui a une bonne visibilité. Si on considère qu’il a besoin de jouer et Dijon dit qu’il n’entre pas dans ses plans de jeu, il doit étudier toutes les demandes. Il doit être compétitif et cela passe par avoir du temps de jeu. S’il a choisi de rejoindre l’Espérance, c’est purement sportif. Cela lui permettra de jouer, parce qu’être tout le temps sur le terrain va lui permettre de retrouver ses sensations et ses qualités de buteur. Il pourra aussi retrouver sa forme habituelle et sa confiance», assure le sélectionneur de l’Equipe nationale locale.

«Il risque de se perdre en Tunisie»

En revanche, Gaoussou Dramé ne cautionne pas le choix de l’ancien attaquant du club israélien de Maccabi Tel-Aviv qui a joué trois CAN (2015, 2017 et 2019) et la Coupe du monde 2018. «Ce n’est pas une bonne décision. Il risque de se perdre en Tunisie, parce qu’on ne va pas le voir sur le plan de la performance. Il ne va pas se relever», prévient l’entraîneur du CNEPS Excellence de Thiès. «Il devait rester en France et chercher un club de Ligue 2 pour le relancer.» «Parce que le Sénégal (l’Équipe nationale) prend des joueurs de Ligue 2 en France. S’il avait la possibilité de retourner à Sion, ce serait mieux que d’aller jouer en Tunisie, parce qu’il n’y a pas une grande différence entre le football tunisien et celui sénégalais. La preuve, nos clubs s’affrontent tout le temps. Il aurait aussi pu revenir au Sénégal, parce qu’il aurait la chance de bien évoluer et d’être proposé à Aliou Cissé. Il doit se donner les moyens de se relancer», suggère le formateur qui se montre pessimiste sur le choix de carrière du Mbourois. «Je ne pense pas qu’il puisse se relancer en Tunisie. Aller en Tunisie, c’est entrer définitivement dans le trou. S’il part jouer dans un pays africain, on va le mettre dans le registre de nos joueurs locaux et ses chances pour un retour en sélection nationale seront réduites. Même sur le plan de la performance, il va régresser de jour en jour. Il risque de terminer sa carrière en Tunisie.»
A 28 ans, l’ancien attaquant du Touré Kunda (devenu Mbour Petite Côte) et l’un des héros du sacre en Coupe du Sénégal en 2010 devant l’Us Gorée (0-0, 4 tab 5) va tenter de relancer sa carrière qui s’annonçait très prometteuse, mais connaît une trajectoire disproportionnée. Depuis sa révélation aux Jeux olympiques 2012 et ses débuts fracassants en Équipe nationale, il peine à confirmer les attentes. Deuxième meilleur buteur à Londres avec cinq réalisations, derrière l’attaquant brésilien Leandro Damião (6 buts) et devant Mohamed Salah (3 buts), Moussa Konaté avait participé au bon parcours des «Lionceaux» qui avaient atteint les quarts de finale avant d’être éliminés par le Mexique (4-2 après prolongations). Après une expérience douloureuse en Russie (Krasnodar) et un prêt en Italie (Genoa), il s’était relancé en Suisse avec le Fc Sion (2014-2017), inscrivant 50 buts en 116 apparitions et la Coupe nationale remportée en 2015. Arrivé à Amiens, deux ans plus tard, Konaté connaît une première saison étincelante en Ligue 1, contribuant grandement au maintien du club picard dans l’élite française lors de la saison 2017-2018. Mieux, avec 13 réalisations, il était devenu le meilleur buteur de l’histoire du club en Ligue 1. Mais gêné par les blessures après son transfert à Dijon et avec un moral en berne, l’avant-centre n’a jamais retrouvé son meilleur niveau.

Didier Tholot, son entraîneur à Sion de 2014 à 2016, sonnait déjà l’alerte en janvier 2020. Contacté par «L’Obs», le technicien français déclarait : «Il serait peut-être meilleur dans une équipe qui joue le haut du classement, il a un jeu qui s’adapte à tous les championnats. Mais c’est quelqu’un qui a besoin de jouer pour être en forme. Il lui faut un contexte favorable. Il a besoin d’être en confiance.» L’avis de l’ancien attaquant bordelais, finaliste de la Coupe de l’Uefa en 1996, est renforcé par Lamine Sano, son ancien coach à Touré Kounda (devenu Mbour Petite Côte), où il a été formé. Sur le plan mental, Lamine Sano décelait une faille : «Il craque vite. Il est très faible dans ce domaine. S’il ne joue pas, il le supporte difficilement. Il doit faire des efforts dans ce sens pour s’épanouir dans le milieu professionnel, où il faut accepter de travailler dur pour revenir à son meilleur niveau.»

«Il a du mal à se faire violence et a tendance à rester sur ses acquis»

Ce sacrifice inhérent à la pratique du sport de haut niveau, Moussa Konaté semble l’ignorer par moments. Didier Tholot se plaisait à le lui rappeler en Suisse. «A Sion, on a beaucoup discuté et je lui ai fait comprendre qu’il fallait qu’il travaille plus. Je l’ai aussi mis, de temps en temps, de côté pour le faire réagir. Moussa est un très bon attaquant. Mais il a du mal à se faire violence un peu. Il a tendance à rester sur ses acquis. Il faudrait qu’il se fasse un peu plus violence et travaille plus, parce qu’il peut encore progresser. Si on le bouge, il peut être performant. Il n’aime pas l’injustice et les conflits, mais c’est quelqu’un qui est à l’écoute. On est arrivé à un travail sur le terrain et en dehors qui était important. J’ai été dur parfois avec lui, mais sincère.»

La méthode Tholot avait porté ses fruits. L’entraîneur avait réveillé le talent de buteur qui sommeillait en Moussa Konaté et qui avait émerveillé le monde du football aux Jeux Olympiques de Londres 2012. «Quand je suis arrivé, il n’avait pas mis un but, mais il en a marqué beaucoup quand il a retrouvé la confiance. On a beaucoup travaillé. Il avait tendance à disparaître : quand il marquait, on ne le voyait plus pendant le match. On a travaillé là-dessus et après, il était capable de mettre des buts. Il a fait une très bonne saison. Il sent bien les opportunités. Le problème qu’il a, c’est dos au but. Ce n’est pas sa qualité.» Cette faille décelée dans le jeu de Moussa Konaté par l’entraîneur français avait contraint Aliou Cissé à faire de son chouchou un nouveau titulaire du banc pour faire de la place à Mbaye Niang sur le front de l’attaque en Equipe nationale du Sénégal. Ce choix fort avait relégué le natif de Mbour à la troisième place dans la hiérarchie des attaquants, malgré sa brillante première saison en France, qui lui avait valu les éloges de son entraîneur, Christophe Pélissier.

Christophe Pélissier faisait, cependant, remarquer qu’«il doit progresser dans ses déplacements vers le but. C’est dû à ses qualités naturelles, il manque un peu de vitesse pour jouer sur les transitions. Mais c’est quelqu’un qui est intéressant quand l’équipe adverse joue sur un bloc bas. Il a beaucoup de puissance. Il est capable de jouer en pointe, mais aussi dans un système à deux attaquants, avec quelqu’un qui lui tourne autour et qui prend la profondeur. Il peut être très bon. Moussa a son propre style : puissant, dos au jeu, de la qualité dans les déplacements, notamment sur les centres. Mais aussi une bonne frappe de balle.» Ces qualités, l’attaquant international sénégalais tarde encore à les mettre en exergue. «C’est dommage, parce que sa marge de progression est importante, déplorait Lamine Sano dans nos colonnes, l’année dernière. Il a tout pour être un bon joueur. Sur le plan physique, il n’est pas démuni et techniquement, il n’est pas mal. S’il est toujours sérieux dans ce qu’il fait et avec la bonne hygiène de vie qu’il avait quand il était avec nous, il ne doit pas se retrouver dans cette mauvaise passe. Espérons qu’il va s’en sortir et redevenir le Moussa Konaté qu’il était, parce qu’il a les qualités pour aller loin.» Avec l’Espérance de Tunis, Moussa Konaté espère sortir des pénombres et retrouver la lumière.

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