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C’est la 63ème minute du match Sénégal – Afrique du Sud et l’arbitre congolais de la rencontre, Monsieur Bamlak, désigne le point de penalty suite à une faute de Youssouf Sabaly. Même si la qualification en Coupe du Monde est normalement déjà acquise, l’attente du verdict du TAS retient toujours certains sénégalais en état de stress. Zwane tire le penalty et le rate, loupant le cadre d’Alfred Gomis et un ouf de soulagement s’empare des travées du stade de l’Amitié. Fort heureusement, un joueur sénégalais sur la pelouse avait compris que c’était dans ces moments précis qu’il fallait rester encore plus concentré : et c’était nul autre que Serigne Modou Kara Mbodj. Pendant que le “capitaine” d’Aliou Cissé, Cheikhou Kouyaté, s’en va embrasser et sauter dans les bras d’Alfred Gomis (qui n’a même pas arrêté le tire), le vrai leader du groupe, en la personne de Kara Mbodj, récupère le ballon des filets et harangue ses coéquipiers, car le match est loin d’être terminé et il reste du travail à faire. Véritable meneur d’homme, est-ce un hasard que c’est ce même Kara qui ira catapulter le ballon au fond des filets sud-africains à la dernière seconde, pour assurer définitivement la qualificationde son pays en Coupe du Monde ? Sans doute pas.

 

C’est dire que pour remporter la guerre, il faut des guerriers. Et on ne peut pas contredire le fait que le symbole du guerrier dans cette équipe du Sénégal, c’est Kara Mbodj. Un joueur qui a connu sa première convocation en 2012, et qui a dû attendre sa chance pendant presque un an, tant la concurrence étaitrude derrière les Kader Mangane, Lamine Sané, Pape Gueye ou encore Cheikhou Kouyaté. Il a fallu attendre jusqu’en Novembre 2013, pour que Giresse lance Kara dans le bain pour la première fois face à la Cote d’Ivoire à Casablanca, un baptême du feu qui ne pouvait pas arriver dans un match plus décisif. Et le joueur tiendra son rang avec brio, au point de s’imposer par la suite comme un titulaire indiscutable aux côtés de Lamine Sané et Djilobodji, puis Koulibaly. On se souvient encore de sa frappe ratée face aux Eléphants à la dernière minute, alors que les camps étaient vides ; un tir qui aurait pu envoyer le Sénégal au Mondial brésilien. Ce fut une erreur et un manque de chance pardonnable pour un défenseur, qui trois ans après n’oubliera pas de mettre le but de la qualification à Dakar. Un autre hasard ? Peut-être pour le sélectionneur.

 

Même quand on parle de statistiques, l’évidence est là. Entre leurs débuts en 2015 et leur dernier match ensemble en fin 2017, la paire Kara-Koulibaly à encaisser 4 buts en 17 matchs, dont 0 buts pris lors de la saison de Coupe d’Afrique au Gabon. Cependant, depuis la saison 2017-2018, l’axe Sané-Koulibaly a encaissé 8 buts en 9 matchs. En 2 fois de plus de matchs la paire Kara-Koulibaly a pris deux fois moins de buts.

 

Le sélectionneur des Lions, Monsieur Aliou Cissé a ses idées ;basés sur les performances en clubs et le « mérite » des joueurs. Ces idées sont louables mais on ne peut pas oublier qu’une sélection nationale est très différente d’un club. La France avait Deschamps en 98, l’Italie avait Cannavaro en 2006, l’Espagne avait Puyol en 2010. Sur le continent africainégalement, le Nigeria n’a surtout pas oublié de donner un rôleimportant à l’expérimenté Joseph Yobo en 2013. Meme s’il n’était pas un titulaire à part entière, il était au sein du groupe et entrait souvent en jeu pour apporter de la sérénité, du leadership et de l’expérience dans la défense des Super Eagles. On ne nommera même pas les leaders au sein de l’équipe de Cote d’Ivoire lors du sacre continental en 2015. Tout ceci pour dire qu’aucune équipe n’est parvenu àremporter de trophées majeurs sans que les meneurs d’hommes de l’équipe, les institutions du groupe, les hommes au mental ne soient présents. Et avec la blessure de Cheikh Ndoye, la convocation de Kara Mbodj était une nécessité.

Pour finir, on prendra exemple sur Didier Deschamps, qui fait quand même partis d’un groupe restreint de trois hommes ayant remporter la Coupe du Monde en tant que joueur et entraineur. Malgré la grande forme de joueurs tels que Clément Lenglet (FC Barcelone) et Aymeric Laporte (Manchester City), Deschamps a convoqué le pilier de la défense des Bleus, Samuel Umtiti (FC Barcelone) pour les matchs importants de qualifications à l’Euro 2020 en mars dernier. Monsieur Cissé était surement en train de se demander comment on peut sélectionner un joueur qui n’a presque pas jouer de la saison suite à une blessure pendant que son compatriote joue chaque weekend dans le même club que lui, et est l’auteur de performances remarquées ? Malgré les arguments avancés par le coach des Lions, notamment lors de la dernière conférence de presse, qu’on le veuille ou non, dans une équipe nationale, il y a une hiérarchie des hommes.Certains joueurs sont plus importants que d’autres. Umtiti fera d’ailleurs deux matchs de grandes qualités avec les Bleus, en ouvrant même le score de la tête au Stade de France contre l’Islande. La hiérarchie a été respecté, et le jour ou Lenglet ou Laporte inscriront un but en demi-finale de Coupe du Monde, ils pourront titiller Samuel Umtiti, même s’il revient de blessure. Au Sénégal, Cissé a fait fi de cette hiérarchie, en mettant de côté l’histoire de Kara Mbodj dans cette sélection, les sacrifices effectués par ce dernier, et le nombre de fois qu’il l’a fait sauter de joie dans sa zone technique, pour louer les performances en clubs de Pape Abou Cissé, Djibril Diaw ou encore Saliou Ciss. Comme au Mondial, cette Coupe d’Afrique s’annonce difficile…

 

Abdoulaye Sarr

asarr97@gmail.com

 

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