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Trois entraineurs limogés pour «insuffisances de résultats», un quatrième qui claque la porte par anticipation, à seulement huit journées du championnat national Ligue 1. Sud Quotidien a donné la parole aux techniciens et observateurs pour diagnostiquer cette véritable hécatombe.

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Les entraîneurs sénégalais de la Ligue 1 sont-ils aussi incompétents que le laisse penser leur durée de vie sur les bancs de leurs clubs respectifs qui ne dépasse guère 360 minutes de jeu ? S’agit-il que de simples fusibles qu’il faut faire sauter dans un souci de créer le déclic ou de calmer la pression des supporters devenus de plus en plus impatients voire agressifs ? Ou est- ce que ce sont les présidents des clubs qui feraient preuve d’abus pour masquer leurs carences dans leur casting ?

Voilà autant de questions qui méritent d’être posées, suite à la série de limogeages des techniciens à seulement huit journées du championnat national Ligue 1.

Le premier à être défénestré, c’est Abdoulaye Diaw. Ancien directeur technique national (DTN) lors de la CAN égyptienne en 1986, il a fait long feu sur le banc de Niary Tally.

Après seulement six journées, il est mis fin à ses fonctions de coach du club du quartier populaire de Dakar pour «insuffisances de résultats», le mardi 28 janvier, à l’issue d’une réunion de bureau présidée par Djibril Wade. Sur 18 points possibles, NBG n’avait enregistré que cinq.

Abdoulaye Diaw sera remplacé par un autre baroudeur, Lamine Dieng.

Le 4 février, c’est le Casa Sports qui imite Niary Tally. La direction du club fanion de Ziguinchor qui vient d’enregistrer trois défaites d’affilée met fin à sa collaboration avec Ibrahima Diarra. Toujours, pour les mêmes motifs : «insuffisances de résultats». Il est remplacé par son ancien adjoint, Simon Kabou.

Trois jours plus tard, le Stade de Mbour embouche la même trompette. Lamine Sano vient à son tour d’être remercié par son président, pour avoir concédé sa deuxième défaite de la saison dimanche dernier, devant le Dakar Université Club (DUC).

Mais contrairement à Niary Tally et le Casa Sports, respectivement lanterne rouge et un premier relégable d’alors, les Stadistes eux, occupent la 7ème place au classement général.

C’est cette suprême humiliation qu’Al Ousseynou Ndiaye a voulu certainement éviter, en prenant les devants. Le Ouakamois a jeté l’éponge, le 6 février, après avoir dit-il senti le coup de la direction de la Suenor qui n’attendait, confie-t-il que sa prochaine défaite à domicile pour lui couper la tête.

AEEFS : syndicat des entraîneurs ?

C’est pour parer cette vulnérabilité que Joe Diop envisage de muter l’Association des éducateurs et entraîneurs de football du Sénégal (AEEFS) en syndicat.

«Ce qui passe est l’illustration parfaite d’une tendance qui exclut les techniciens du football sénégalais. Nous ne sommes ni dans le comité directeur de la FSF, ni dans la Ligue professionnelle, ni dans la ligue amateur», martèle l’ancien coach du Sénégal.

C’est pourquoi, Joe Diop suggère à l’AEEFS qu’il préside de se transformer en syndicat. «L’AEEFS doit revoir sa fonctionnalité, son organisation en tant qu’association qui regroupe tous les éducateurs et entraîneurs du Sénégal. Dans un contexte de marchandisation du sport, du football professionnel, nous devons nous muer en syndicat», plaide-t-il.

Et d’ajouter : «il nous faut un statut juridique et législatif de l’éducateur et de l’entraîneur».

Quant à l’entraîneur de l’As Pikine, il reconnait d’emblée que «par essence, le métier de l’entraîneur est très difficile, parce qu’il dépend de ses résultats». Toutefois, s’est-il empressé de préciser : «ce qui se passe au Sénégal, ce sont des conneries !»

«Rien n’explique ce que les présidents de clubs sont en train de faire» !, s’exclame Alassane Dia, dont l’équipe occupe la deuxième place du championnat, sans enregistrer la moindre défaite.

Pis ajoute-t-il, «ils se dédisent eux-mêmes, parce que ce sont eux qui ont porté leurs choix sur les entraîneurs, pour les virer après seulement quatre journées». «S’il y a eu mauvais casting, ils doivent aussi se démettre», soutient Alasane Dia.

«Nous avons un championnat long. C’est une épreuve de longue haleine. Mais tout le monde veut quitter tôt et arriver tôt».

Le technicien de l’As Pikine n’approuve cependant pas l’idée de Joe Diop. «L’AEEFS ne peut être transformée en rien du tout !», tonne-t-il. «Elle est en léthargie depuis plus de deux ans par la faute de qui ?», s’interroge-t-il.

Pour Alassane Dia, les techniciens sénégalais sont à l’origine de ce qui leur arrive. «Quand on n’entraîne pas, on n’est pas concerné. Ce sont les mêmes discours que l’on entend. Nous sommes donc tous responsables, sans être coupables».

Mais le comble, confie l’ancien coach du Jaraaf, c’est que les dirigeants ne paient généralement pas des indemnités aux techniciens quand ils les limogent. «Les clubs ne respectent pas les contrats. De notre côté, on se voit mal les trainer devant les juridictions», confie-t-il.

«Trop d’incohérences»

Mayacine Mar, lui non plus n’arrive pas à comprendre la situation qui prévaut dans le championnat national Ligue 1, avec la cascade de limogeages.

«Que cherchent les présidents de clubs ? », s’est interrogé le directeur technique national de la FSF, qui dit douter que les patrons des clubs veulent un technicien qui règle leurs problèmes.

«C’est quand même impossible ! Les dirigeants doivent savoir ce qu’ils veulent, où le chercher et avec qui ? Ils ne peuvent faire tout le casting pour ensuite virer le coach après quatre journées».

L’ancien coach de l’As Douane, des «Lions» s’est aussi demandé si ce ne sont pas les techniciens qui acceptent certains challenges sont être capables de les relever. «Un entraîneur, confie-t-il, a besoin de deux ans, pour prendre ses repères».

Prenant l’exemple d’Al Ousseynou Sène, M. Mar rappelle que c’est lui qui avait fait monter l’équipe de Suneor en Ligue 1. Par conséquent, «les gens devraient comprendre qu’il serait appelé à perdre et à gagner».

C’est pourquoi dit-il, «il y a trop d’incohérences» dans les méthodes des présidents des clubs. Il suggère alors la mise sur pied d’un cahier de charges qui définit clairement les objectifs de chaque club.

Quant aux « limogeages abusifs», il dira qu’il est du ressort de l’AEEFS de prendre la question en charge.

«Parce que dit-il, nous ne sommes pas en équipe nationale, où l’on exige le résultat immédiat. En club, on gère le quotidien. On fait des erreurs et on les rectifie ensuite».

Toutefois, pour notre confrère Babacar Khalifa Ndiaye, du quotidien national Le Soleil, il n’y a pas de quoi fouetter un chat dans ces séries de limogeages. Et pour ce, soutient-il, «c’est la loi du sport. Ici, on chante tes louanges et ailleurs, on te demande de faire tes valises. Ce n’est pas seulement l’apanage du Sénégal. On ne peut pas virer tous les joueurs, on vire l’entraîneur. C’est le moindre mal».

«C’est la loi du terrain qui l’exige. Le technicien doit faire des résultats. On dit souvent qu’il a ses valises bouclées. Au Sénégal, nous avons un championnat court. Il faut partir à temps et arriver à temps. Il faut aussi faire avec la pression des supporters», soutient-t-il.

Toutefois s’est empressé de préciser notre confrère, «il faut faire un distinguo entre les promus et les clubs qui jouent les premiers rôles».

©Sudonline

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