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[quote]Les Lignes de Tidiane Kassé[/quote]

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Cela pince toujours au cœur de voir ces matches amicaux de l’équipe nationale qui renvoient à des airs de rendez-vous du dimanche matin, sur un quelconque terrain vague.

Ce soir encore, avec Sénégal-Mali qui se dispute à Saint-Leu-La-Forêt, des professionnels rompus aux grands rendez-vous, baignant parfois dans l’ambiance délirante de stades chauffés à blanc, vont se retrouver dans une enceinte où les têtes qui peuplent les gradins peuvent se compter en petits paquets, avec des courants d’air qui passent un peu partout et où les noms d’oiseaux qui tombent des tribunes, peuvent s’entendre jusqu’au rond central.

On peut rêver de mieux pour un Sénégal-Mali, avec les stars qui vont peupler le gazon, mais les habitudes sont désormais ancrées. Les répétitions générales pour l’équipe nationale, c’est entre France et Navarre qu’on les déroule. Avec une ambiance de pique-nique où le match amical tombe facilement dans le match banal, où le jeu renvoie souvent à une sensation de facilité et de retenue de la part de joueurs que rien ne met sous pression.

En faisant cap sur Paris, on cherche le plus commode, mais on y perd en utilité. Ce Sénégal-Mali disputé à Bamako ou à Dakar (oui, pas possible cette fois ; donc juste pour l’exemple) aurait offert une intensité plus révélatrice des forces et des faiblesses qu’on cherche à diagnostiquer dans de telles rencontres. Il aurait été plus instructif dans la recherche des repères à poser dans la construction d’un jeu.

Paris est commode parce que les distances sont réduites, entend-on. Mais Bamako et Dakar ne sont pas sur la Terre de feu. Maîtriser la logistique et l’organisation suffit à créer les conditions idéales de voyage. Les coûts sont évoqués pour s’appuyer sur les économies d’échelle, mais le différentiel n’est pas énorme. Des retombées commerciales plus diversifiées et les effets induits d’un match à la maison offrent des possibilités de rentrées d’argent plus importantes.

On parle encore de l’environnement social qui perturbe la concentration des joueurs, mais c’est plus un signe de faiblesse et de démission devant les exigences d’une gestion professionnelle d’un groupe qu’autre chose. Il y a surtout ce qu’on ne dit pas : l’environnement sportif. A 4 700 km de Dakar, les pilules amères s’avalent mieux. Et s’il arrive que les dragées soient mielleuses, on peut toujours en garder plein la bouche jusqu’au retour triomphal à Dakar. C’est le genre de plaisir qu’on ne boude pas.

A Saint-Leu-La-Forêt, ce soir, ce sera plus une affaire de «communauté» que de sportifs. Maliens et Sénégalais, venus en familles ou en bandes de copains, vont se replonger dans le bouillon de culture originel pour rechercher leurs pulsions perdues, oubliées  ou déteintes dans un monde qui leur brouille les repères. Ça va chahuter dans la petite tribune ouverte aux vents frais et qu’importe le score, tout le monde sera heureux.

A Dakar ou à Bamako, cela aurait été le délire.

La fadeur des matches amicaux de banlieue parisienne, on la vit à 4 700 km de distance. Devant un écran de télévision aux images fuyantes et mal cadrées, aux panoramiques saccadées et aux zooms erratiques, on a souvent souffert d’un spectacle indigeste filmé avec les «moyens du bord».

En cette belle soirée de mercredi où la planète-foot vibre en mille lieux, il sera difficile de ne pas zapper. Un magnifique France – Pays-Bas est au Stade de France. Belgique-Côte d’Ivoire offre un superbe détour du côté de Bruxelles. A Lisbonne, Portugal-Cameroun devrait être un délice. Sans oublier Afrique du Sud-Brésil à Johannesburg.

Pendant ce temps, dans un obscur stade de Saint-Leu-quelque-chose,  les «Lions» vont se mettre à la petite besogne. Ce n’est pas l’adversaire qui manque de tenue, c’est le lieu qui manque de classe. On ne peut rester dans les bas-fonds et espérer voir poindre au-dessus de sa tête les lumières qui illuminent les destinées fécondes.

A continuer d’enfermer les dates-Fifa du Sénégal dans des ambiances de randonnées pédestres au cœur de la forêt, on ne sortira pas de ces logiques de matches de bienfaisance où Giresse peut aligner onze joueurs par mi-temps.

Les dates-Fifa sont rares et précieuses. Ce ne sont pas des rendez-vous autour de la théière pour faire de la psychologie de couloir. Avec un groupe que Giresse a mis du temps à placer dans la bonne trajectoire et dont il a touché du doigt le potentiel depuis le dernier match contre la Côte d’Ivoire, le temps des vérifications et des prises en main relève du passé. Il faut polir et consolider.

Les «Lions» sont à mettre face à des défis qui les poussent à rester dans les standards de la rigueur et du dépassement. En termes d’adversaire comme en termes de cadre de performance. Un bon adversaire, un bon stade, un bon public et on construit les mentalités qui vont avec.

Il faut éviter les facilités coupables. Les matches de plaisir appartiennent désormais aux œuvres de bienfaisance et ces petits rendez-vous de banlieue parisienne n’ont rien de classe pour qui se réclame d’un certain standing.

Vivement que Léopold Senghor ressuscite !

 

Waasport

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