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«Ça fait trop mal». C’est ainsi qu’Alain Giresse a résumé le débriefing du match Sénégal / Côte d’Ivoire de samedi. Même s’il ne refuse de s’enflammer après la probante prestation de ses joueurs, le sélectionneur pense que le contenu de la rencontre pouvait envoyer le Sénégal au Brésil. Entretien

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Coach, avec le recul, qu’a-t-il manqué aux Lions samedi ?

Sur le match, rien n’a manqué en termes de contenu, d’implication et de qualité de jeu. Même sur le plan physique, on a été à la hauteur. Malheureusement, c’est l’essentiel qui nous a fait défaut : ce deuxième but. On ne peut pas parler de manque d’occasions. On s’en est procuré beaucoup. C’est vrai que je n’ai pas revu le match, mais ce dernier geste nous a fait défaut. Tout nous a réussi sauf ça. C’est regrettable. Des matchs comme ça sont difficiles à digérer. Ça fait très mal même si on est sorti la tête haute.

Comment êtes-vous parvenu à gêner le jeu ivoirien ?

Notre système et notre organisation les ont un tout petit peu perturbés. Ils n’ont pas pu faire face à notre tactique parce qu’on a tout modifié. On l’a fait pour que l’adversaire n’ait aucune solution pour nous contrer. À partir de là, il y avait de l’engagement et cette volonté des joueurs qui ont respecté les consignes jusqu’au bout.

Ne nourrissez-vous pas des regrets sur l’ensemble des deux matchs ?

Pas forcément sur le premier. Là, on reviendra sur le début de match malheureusement. C’est pendant les quinze premières minutes qu’on est passé à côté. Tel que le match s’est déroulé le samedi, les deux buts étaient jouables. En discutant avec plusieurs observateurs même en Europe, ils me disent qu’il n’a manqué que rien du tout. Sur l’ensemble des deux matchs, la qualification était plus logique et on a plus dominé cette équipe-là qu’elle ne l’a fait au match aller.

Sur quoi avez-vous basé votre discours ?

(Rires) Je peux vous dire que ce match là a été bien préparé. Aussitôt après le match aller, je me suis renfermé pour définir et choisir le système de jeu. Après il fallait mettre les hommes pour l’animation. Dans mon bureau, j’avais toutes les notes sur le tableau. Au-delà de l’aspect  technico-tactique, on a bien tenu compte de l’acte de la compétition. Parce que tout le monde ne travaille pas de la même façon. Tout a été planifié pour créer des problèmes à cette équipe ivoirienne.

Est-ce que vous n’êtes pas en train de vous dire que c’est le moment de réécrire l’histoire du football sénégalais ?

Non (Il insiste sur le mot). Je n’ai pas dit ça. J’ai juste dit qu’il y avait quelque chose à faire. Ce serait de la prétention de dire qu’on veut ou on va réécrire l’histoire du football sénégalais. Moi dans mon rôle et dans ma fonction, c’est de faire en sorte que cette équipe soit compétitive et prenne de l’envergure pour atteindre le niveau qui lui permet d’être performant. Après, ce n’est pas à moi qui parle. Les gens jugeront d’eux-mêmes. Depuis que je suis là je construis et bâtis une équipe. Il faut rectifier et modifier pour avancer. Aujourd’hui, le groupe a traduit sur le terrain qu’il vit bien et travaille d’arrache bien. Ce match a démontré ce que j’entends faire. Pour moi, par rapport à cette équipe là, il y a un avant Casablanca et il doit avoir un après Casablanca. Vous connaissez bien cette équipe là. Il n’y a pas un joueur qui a déjà fait une prestation de ce niveau en équipe nationale. Ce veut dire qu’ils ont fait quelque chose de fort. Même les plus anciens comme Papiss, Moussa et Dame, ils n’ont jamais fait un tel match.

Qu’avez-vous regretté sur ce match ?

Je crois que même si on se croise dans dix ans, on reparlera de ce match. On le décortiquera toujours. Il y en aura toujours des regrets. On ne  pourra jamais se consoler de ne pas être qualifié. Je n’ai regretté que ce
deuxième but qui n’a pas été marqué. C’est ce genre de match qui fait mal. On a tout eu dans cette rencontre, malheureusement, elle n’a pas tourné à notre faveur.

Jouer avec trois axiaux en défense n’était-il pas risqué ?

Et pourquoi ? (Éclats de rires). Tout le monde attend des changements et après vous me posez cette question. Ah il faut savoir ce que l’on veut hein. Je vous l’ai dit, j’avais choisi le système. Vous parlez de trois  défenseurs centraux. Vous avez personnellement écrit que Lamine Sané allait jouer latéral droit. Mais ça met de la puce à l’oreille. Si les Ivoiriens lisaient la presse sénégalaise, ils allaient nous contrer et voilà et vous serez les premiers à critiquer. Moi, c’est dans le vestiaire que j’ai découvert l’équipe de Côte d’Ivoire parce que personne n’a pu accéder à l’équipe ivoirienne pour donner des infos.

Vous n’avez pas répondu à la question…

Pour revenir aux trois axiaux, il y avait un axial comme Kara Mbodji. Des joueurs comme Lamine Sané capable d’aller sur le côté droit et Djilobodji qui est un gaucher de coulisser dans l’autre couloir sont capables de courir et d’aller chercher le ballon dans les pieds de l’adversaire. Cela a permis à
Badji (Stéphane) et Souaré (Pape Ndiaye) d’être offensivement à l’aise. En jouant sur ce registre, il n’y avait aucun risque.

Le fait de vous préparer dans la tranquillité a-t-il eu un impact dans la performance du groupe ?

D’abord vu le lieu de regroupement et de rassemblement, on était dans un cadre parfait. On n’a noté aucune agitation et il y avait un terrain à côté. Les gens ont évoqué une heure de route pour revenir à Casa. Là aussi on était dans un bon cadre, en dehors de la ville de Casa. On s’est entraîné dans un terrain que personne ne connaît à la veille du match. C’est comme ça dans la tranquillité, la sérénité qu’on peut travailler. Cela ne veut pas dire que l’équipe nationale fuit. Non, loin de là. On ne peut pas
faire vivre une équipe nationale, dans le brouhaha, dans l’animation ou dans le désordre et réclamer le jour du match des joueurs au top niveau dans un match où la nervosité s’installe.

Est-ce qu’après cette prestation du Sénégal, les qualifications de la CAN-2015 s’annoncent sous de bons auspices ?

Il n’y a rien de garantie. C’est simplement la démonstration de la capacité du haut niveau. Il ne faut pas s’enflammer, il faut être conscient de ça. Ne comptez pas sur moi pour relâcher tout ça, surtout pas. Je sais comment ça se passe. Après le match aller, on n’était bon à rien, aujourd’hui, on est champion du monde. Non, ce n’est pas comme ça que ça fonctionne. Il y a un juste milieu. Au match aller, ce n’était pas aussi catastrophique que ça. Ce match est une référence, mais arrêtons de nous imaginer que tout est rose. Les qualifications ne sont jamais des matchs simples. Ce n’est pas parce qu’on a réussi cette rencontre face à la Côte d’Ivoire que le reste sera une promenade de santé.

Quid des prochaines dates FIFA ?

Moi je suis en train de préparer toute une planification. Il faut tout utiliser. Je vais présenter le travail à la Fédération et je crois que ça peut être une  présentation publique. On mettra en place tout ce qui est nécessaire pour aborder les éliminatoires dans de bonnes conditions. Ça se prépare dès à présent et c’est ce que je suis en train de faire.

Coach, reconnaissez-vous vous être trompé au match aller ?

Reconnaître que je me suis trompé sur le match après le match n’a pas de sens. J’aurais aimé qu’avant la rencontre vous me dites : coach, vous êtes en train de vous tromper. Vous attendez après coup pour me le dire ?  Non, je ne vais pas tomber dans la facilité. Si avant le match je me rendais compte que je me trompais sur un joueur, vous pensez que je l’aurais mis ? Toute la résultante négative qui se produit après le match est regrettable. Avant, je me dis que j’avais tout fait, tout était fin prêt. Vous pensez que Didier Deschamps savait qu’il allait être battu comme ça par l’Ukraine ? Les entraîneurs sont tous comme ça. Mais c’est après qu’il faut tirer des enseignements. C’est ça la capacité à réagir par rapport au
premier match.

Ne pensez-vous pas qu’en un moment du match Papiss Cissé devait être remplacé ?

Excusez-moi, parce que je ne peux pas répondre à cette question-là. Ce n’est plus de l’objectivité. Ceux qui le disent font des déclarations partisanes. Ils veulent déranger le joueur. À ce niveau-là, je pense que
Papiss a fait un match plus que courageux. Il a certes manqué une occasion comme tant d’autres l’ont fait. Mais après, chacun est libre de dire ce qu’il veut.

Le public a besoin d’une vraie identité de jeu de son équipe. Est-ce  qu’aujourd’hui, Giresse est-il prêt à la lui donner ?

À travers ce match, je dirai que nous avons une équipe en devenir. Mais il faut que les gens prennent conscience qu’il y a du travail. On a mis en place un système qui avance, qui progresse. Maintenant il faut rééditer ce dernier coup. Regardez l’âge de l’équipe quand vous y enlevez Papiss Cissé, Dame Ndoye et Bouna Coundoul.

Quel commentaire faites-vous du message du président de la République ?

C’est un retour appréciable. Ça prouve que le football sert déjà à quelque chose. Ce message du président de la République permet aux joueurs de rester dignes sur le terrain. Ce message va booster et donnera plus de fierté à l’équipe.

 

 

Stades

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