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«Cela ne peut continuer. Il faut réformer le club sénégalais qui voit ses meilleurs joueurs partir chaque année. Et pour exister, on compte sur la poche d’une ou de deux personnes. Il faut revoir tout cela.» Le président de la Fédération sénégalaise de football a crié son ras le bol. Le Jaaraf venait de tomber devant une anonyme équipe ghanéenne, quelques heures avant la chute des Diambars à Ougadougou.

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Ainsi donc, le temps est venu d’ouvrir les yeux et de porter un regard critique sur le football dit professionnel. Autrement dit, de revenir à la question qui se pose depuis des lustres : peut-on réformer un football de club ancré dans un concept traditionnel têtu ?

L’idée d’une vraie réforme ne date pas d’aujourd’hui. Dès la fin de la décennie 1970, le ministre des Sports de l’époque, feu François Bob, séduit par l’expérience que menait l’Us Gorée dont la section foot était dirigée par Alain Pansard, avait suscité une tournée en Afrique pour aller voir ce qui se faisait de mieux en matière de club de type nouveau et  voir comment  s’en inspirer.

Les premières conclusions aboutirent au constat que le milieu économique sénégalais n’était pas  assez porteur pour supporter un tel projet et qu’il était nécessaire de trouver une solution sénégalaise. L’Etat qui représentait le seul secteur économique porteur ne permettait pas, dans sa conception du sport, une telle éventualité qui nécessite des financements conséquents.

Dans le schéma en place au Sénégal, l’Etat ne finance pas  le sport. Il octroie des subventions pour accompagner la délégation de pouvoir et attribue un plafond pour le financement des compétitions internationales.

La réflexion continua jusqu’au départ de feu François Bob et les dossiers du club de type nouveau furent classés.

C’est le Jaaraf qui allait reprendre les choses en main pour essayer de sortir des sentiers battus. Une première opération dite Jaaraf 2000 allait naitre avec le retour de Lamine Diack à la tête du club. Pour une première fois, le système dit d’actionnariat est établi. Par familles entières, les supporters adhèrent en achetant des parts de 10 000 F. Les caisses se remplissent, mais la suite n’a pas été planifiée. Assez vite, des querelles de positionnement entre la section de football et le comité directeur font échouer le projet.

Ensuite, le vice-président d’alors, feu Fara Ndiaye, lança un concept appelé Jaaraf Sa, au début de la décennie 1990. Devant fonctionner comme une société de droit privé sénégalais, Jaaraf Sa, bien que déjà en partenariat avec une entité suisse, fut sabordé par les tenants de l’Asc Jaaraf qui ne voyaient pas un bon œil le retour des anciens dirigeants des Espoirs de Dakar. Et le projet fut sabordé.

Le club traditionnel continuera son cours jusqu’à l’arrivée de la Fifa. L’instance mondiale débarqua après les déconvenues de la Can 2008. Après deux missions au Sénégal et une réunion quadripartite entre Etat, Fédération, Caf et Fifa, fut mis en place un Comité de normalisation. Parmi les mesures d’accompagnement figurait «la relance d’un football national par la mise en place, par étapes, d’une ligue professionnelle». Et c’est justement au président de l’actuelle Fédération qu’il revint de gérer une commission de réforme à ce sujet.

Ce dernier n’a curieusement pas pris le temps nécessaire pour, comme le recommandait la Fifa, faire progresser le projet par étapes. Y a-t-il eu des contingences internes pour pousser à presser le pas vers la ligue professionnelle ? Il y a des raisons le  croire.

D’un budget de participation fixé à 50 millions de francs, on est arrivé à un cautionnement   bancaire de 5 millions. Presque du sabordage. Cinq ans après, les résultats n’ont pas tardé. Aujourd’hui que la nécessité se pose, peut-on réformer le club sénégalais ? Il faut admettre que les choses n’ont pas évolué depuis les constatations de l’époque de François Bob.

Une réforme est possible, mais à condition de changer la démarche à effectuer avec l’Etat. Ce dernier, à défaut de pouvoir financer un football professionnel – ce qui est normal – peut offrir un partenariat avec des formes de cautionnements. Cela se fait en Algérie avec les fusions clubs-entreprises sous forme de parrainages, ou encore au Gabon et au Cameroun, avec une formule permettant de susciter le financement d’une entreprise étatique qui, en retour, devient bénéficiaire d’appuis à la hauteur des budgets alloués aux clubs. Que ce soit sous forme d’exonérations d’impôts sur les bénéfices ou d’autorisation d’importation.

Des solutions à la mesure du contexte sénégalais sont trouvables. Au président de la Fédération, aujourd’hui au centre du constat d’échec du club sénégalais, de revoir ses copies. Cela hors de toute contingence et, au besoin, avec les vrais experts qui se sont déjà penchés sur la question.

La proposition de la Fifa d’engager des réformes par étapes est une piste à rouvrir. D’autant que ceux qui se bousculaient au portillon de l’empressement ont aujourd’hui des raisons de tempérer leurs ambitions individuelles.

 

WaaSport

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