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Les 1000 personnes présentes à l’inauguration du centre Amara Touré de Génération Foot samedi dernier n’oublieront certainement pas de sitôt un moment qui fut marqué par des discours émouvants et la détermination affichée des principaux acteurs concernés. Mémorable.

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« Nous sommes ici pour célébrer par cet acte grandiose la magnifique amitié franco-sénégalaise ». L’animateur de lacérémonie d’inauguration des nouvelles installations de Génération Foot, qui avait par ailleurs précédemment œuvré lors del’intronisation du nouveau président de la République Macky Sall – excusez du peu – avait placé la barre haut à l’heured’introduire l’événement sur les coups de 11h30, au milieu d’un millier de personnes venues spécialement pour l’occasionau cœur de tribunes provisoires montées sur le site de l’Académie Génération Foot.

Jules Bocandé, trait d’union entre Metz et le Sénégal

Il a trouvé en Bernard Serin, élégamment vêtu d’un magnifique boubou traditionnel immaculé pour la circonstance, un partenaire oratoire de choix, lui qui commença par rendre hommage au sacrifice des tirailleurs sénégalais lors des deux guerres mondiales et par saluer Mady Touré et Youssou Ndour d’un « Salam alaykum » chaleureusement applaudi.

« Le message que porte l’événement d’aujourd’hui est un message d’amitié entre le Sénégal et la France, a ainsi asséné le président du FC Metz, une amitié scellée par les liens du sang mais aussi une amitié du football », rappelant au passage que le premier footballeur professionnel africain à évoluer en France avait été Raoul Diagne dans les années 1930 et insistant sur le lien fort existant entre le pays de Leopold Sedar Senghor et le club grenat depuis le passage de Jules « François » Bocandé.

« Chers amis de France, nous n’oublierons jamais ce que Metz a signifié pour notre Jules François Bocandé, a continué l’animateur après avoir loué le patrimoine culturel de la cité mosellane (l’évocation de la cathédrale Saint-Etienne et des Mérovingiens étant savoureusement décalée au beau milieu de l’étouffante campagne sénégalaise), et nous n’oublierons jamais qu’il y a même choisi d’y quitter notre terre. »

L’esprit de l’ancien Lion de la Terranga a plané sans relâche au-dessus de cette cérémonie, marquant de son empreinte et de son souvenir une assemblée qui lui est toujours pieusement attachée. A l’issue du protocole, un flamboyant – cet arbre à la floraison rouge (grenat ?) spectaculaire – a même symboliquement été planté à sa mémoire par Mady Touré, Youssou Ndour, Carlo Molinari et Bernard Serin dans la cour centrale du site qui borde les vestiaires et les terrains d’entraînement, sous les yeux de son fils Daniel, lui aussi passé par Génération Foot et par le FC Metz, honoré de cet hommage.

Respect du passé, espoir de l’avenir

Le déroulement du fil de l’histoire était aussi le fil conducteur de la cérémonie. Au discours du chef de village de Deni Biram Ndao, âgé de 116 ans, a succédé celui tout aussi saisissant du jeune Ousmane Sambou, élève en 1ère au lycée de Sangalkam (la ville la plus proche) et joueur de l’Académie Génération Foot.

Touchant de respect et de conviction, le footballeur qui n’avait pas dû être souvent en situation de parler devant un parterre de personnalités aussi reconnues (le public comprenait tout de même l’idole nationale Youssou Ndour, le tout aussi vénéré El-Hadji Diouf, mais aussi le Consul de France au Sénégal, Diafra Sakho et Mayoro Ndoye, le Général Duhau commandant en chef des éléments français au Sénégal, sans oublier Carlo Molinari, Bernard Serin, de nombreux journalistes et une délégation en provenance directe de Metz), devant autant de monde tout court aussi d’ailleurs, n’a jamais eu les lèvres tremblantes au moment de remercier « Tonton Mady » et « Papa Bernard Serin » – un  moment délicieux inoubliable pour ceux qui ont eu la chance de l’entendre –, leur demandant dans une imploration sincère de « continuer à les soutenir » car lui et ses compagnons sont « la nouvelle vague de footballeurs champions qui [seront] aussi aptes à assurer la socialisation du Sénégal demain ».

Pas bégueule, Ousmane Sambou s’est également adressé à Amina Touré, Madame le Premier Ministre du Sénégal, pour lui demander d’aider ses bienfaiteurs dans la mission qu’ils se sont donné par le biais de l’Académie Génération Foot.

Un îlot au milieu des dunes

Allez croire, ensuite, qu’il reste encore des jeunes en rupture scolaire au Sénégal ! Le trajet jusqu’à l’Académie, pourtant, valait mieux que tous les chiffres. En traversant les villages alentour depuis Sangalkam, les Gorom, Bambilor et Deni Biram Ndao, en cahotant sur des pistes ensablées dans un bus qui a prouvé qu’il pourrait rivaliser avec le meilleur des 4×4, cette réalité sur les difficultés et la misère que les Sénégalais côtoient au quotidien sautait aux yeux.

Des déchetteries nées au fil des jours dans lesquelles des chèvres et des chats faméliques creusent vainement pour trouver un quignon à grignoter, des cases bondées devant lesquelles des villageois font commerce de tout et surtout de n’importe quoi pour survivre, des charrettes tirées par des ânes dont on croirait qu’ils ont fait dix fois le tour de la terre, et des dizaines et des dizaines de gamins qui courent, qui rient, qui cherchent comme ils peuvent un petit morceau de bonheur en plus : la route jusqu’à l’Académie Génération Foot a le mérite de remettre les points sur les i de vos interrogations d’Européens un peu décalqués par l’expérience.

Alors, quand surgit après plus d’une heure et au bout de la dune ce nouveau centre Amara Touré flambant neuf, flanqué de part et d’autre du blason du FC Metz et du logo de Génération Foot, c’est un peu comme si on vous avait largué sur un bout de paradis, ou comme si Buzz Aldrin était revenu sur la Lune pour y planter le drapeau des Grenats.

Mady Touré : « Nous sommes désormais une famille »

Un drapeau, et des maillots. Ici au milieu d’hectares de sable, les maillots grenat pullulent et les joueurs de l’Académie entonnent spontanément des « Ici c’est Metz » qui résonnent dans vos têtes encore longtemps après, vous laissant un petit goût de fierté coupable dont vous avez du mal à vous départir. « Je voudrais partager avec vous trois sentiments aujourd’hui,a confirmé Bernard Serin dans son discours. Le premier, c’est le bonheur d’être ici, d’être avec vous et de voir ces jeunes footballeurs et les installations dont ils disposent désormais. Le deuxième, c’est la fierté d’avoir réussi un pari audacieux et d’avoir accompagné Mady Touré sur ce projet, malgré les difficultés qui ont pu surgir durant ce long cheminement qui a duré treize ans. Et le troisième sentiment, c’est la reconnaissance que je voudrais exprimer à l’égard de Mady Touré, de Youssou Ndour, de tous ceux qui ont accompagné ce projet et qui ont contribué à la réussite de ce chantier. »

Rappelant aussi que « la route est encore longue » pour poursuivre les objectifs que s’est donné l’Académie Génération Foot, aussi bien en termes de pratique du football de haut niveau que de développement éducatif, scolaire et social de ses pensionnaires, Bernard Serin a passé le message : à l’avenir, il devrait désormais solliciter le concours d’institutions privées et publiques – hors du Sénégal, précision d’importance – pour que la mission de « GF » puisse être menée à bien. Mady Touré, le président fondateur de l’Académie Génération Foot, n’en a pas moins dit lorsqu’il s’est adressé publiquement à son « grand frère » Youssou Ndour, représentant l’Etat sénégalais en tant que ministre conseiller du Président de la République, pour lui demander son soutien sur certaines questions réglementaires et logistiques.

Mady Touré, l’homme qui a reçu de nombreux hommages en ce jour qu’il a certainement attendu depuis treize ans, est également monté à la tribune pour raconter l’histoire de l’amitié messino-sénégalaise, pour raconter aussi son histoire d’amitié avec le FC Metz, née en 1997 autour d’un match Monaco – Metz qui lui a fait rencontrer Carlo Molinari et continuer ensuite son œuvre avec son successeur. « A toi Bernard Serin, en plus de mes remerciements, je te confie que nous sommes désormais plus que des partenaires, nous constituons maintenant une même famille et nous sommes amenés à cheminer ensemble pour longtemps, main dans la main » a déclaré le président de Génération Foot.

« Nous avons commencé en 2000 avec une table, une chaise, deux ballons et vingt joueurs qui étaient encadrés par des éducateurs et des répétiteurs en anglais et en informatique, a-t-il témoigné. Mais nous avons persévéré, avec l’aide du soutien indéfectible que nous a accordé le FC Metz. Génération Foot, c’est un centre d’accueil multidisciplinaire qui a pour ambition d’aider mes jeunes compatriotes à faire éclater leur talent, mais d’aider aussi ceux qui échoueront dans la voie du football à acquérir les bases pour exercer un métier à leur sortie de l’académie. Le préalable à toute voie ici, ce sont les études. »

Youssou Ndour : « Foncez avec Mady Toure ! »

Si ces paroles vous semblent faire écho à certaines valeurs dispensées à des milliers de kilomètres de là, au sein du centre de formation mosellan, tout est normal : les idéaux sont partagés et la nécessité d’une scolarisation suivie reconnue aux deux endroits. D’autant plus dans un pays d’Afrique où le football constitue un rêve en forme d’échappatoire pour de nombreux jeunes et leurs parents, ces derniers n’hésitant pas à déscolariser leurs marmots pour les faire taper dans un ballon.

Youssou Ndour, qui avait accompagné le jeune Mady Touré âgé de 14 ans lors de son arrivée en France et qui lui avait savamment conseillé alors de « ne jamais oublier ce pourquoi [il] était là et surtout de toujours croire en [lui] » a paru apprécier ces messages venus du cœur des différents interlocuteurs et a surtout tenu à ce que chaque personne de l’assemblée sache la confiance qu’il porte au président de l’Académie Génération Foot.

« Je veux dire ce jour au Président du FC Metz, a confié le chanteur mythique de Seven Seconds : nous sommes dans un monde de concurrence, la concurrence est partout, mais vous avez bien misé car Mady Touré, c’est l’avenir. Vous devez foncer avec lui ! » Signifiant dans un « Je m’en occupe » rassurant qu’il avait bien entendu les demandes plus ou moins voilées des uns et des autres adressées à l’institution républicaine qu’il représente, soulignant même que « l’Etat devait encourager ce qui a déjà été lancé » mais lançant curieusement un « Endettez-vous ! » à Bernard Serin, Youssou Ndour a joué son rôle de parrain de manière parfaite, se pliant à la conférence de presse et déambulant au milieu d’une joyeuse cohue sans paraître jamais agacé.

Pour tous ces jeunes footballeurs, pour tous les villageois présents, pour tous ces gamins tout émerveillés d’assister à un tel événement au cœur de leur paysage traditionnel, pour toutes ces personnalités quelque peu émues d’avoir été là, ce jour-là et ici, et sans forcément le reconnaître : pour toutes ces phrases étonnantes de sincérité alors qu’elles auraient pu sonner creux, pour ce respect mutuel qui émanait de chacun, cette cérémonie d’inauguration restera un moment mémorable. Inoubliable, et à ne pas oublier.

Les Photos de l’inauguration ici

FCmetz.com

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