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Daour Gaye est un ancien footballeur, pur produit du Casa-Sports de Ziguinchor, qui a suivi son étoile dans le championnat professionnel en Belgique, puis amateur en France. Pour sa reconversion, Daour Gaye a opté pour la sauvegarde de la mémoire du Sport. Son travail de 20 longues années a pondu un livre de 280 pages, dont 300 photos. Dans son livre, «L’histoire du football sénégalais, tome 1, de l’Aof aux indépendances», préfacé par Abdou Diouf (ancien président de la République) et où il y a un mot de Lamine Diack, Daour Gaye raconte le football sénégalais des origines à la Réforme Lamine Diack. En attendant le Tome 2 qui va faire l’inventaire du football sénégalais de 70 à 2014. Dans cet entretien, l’auteur donne un avant goût de son ouvrage.

Quels sont les faits marquants de l’histoire du football sénégalais de l’Aof aux indépendances ?

Cette première partie de l’histoire du football sénégalais est marquée par la qualité des dirigeants des équipes qui incarnaient des valeurs sénégalaises. Ce sont des valeurs qui, à l’époque, ont permis aux dirigeants d’organiser à partir de 1946, sur l’ensemble des territoires de l’Afrique Occidentale Française (Aof), une compétition qui s’appelait la Coupe de l’Aof. Cette compétition était organisée à partir de Dakar, signe du dynamisme de ses dirigeants. Pendant cette période, le football sénégalais a vraiment excellé parce qu’on a remporté plusieurs éditions de l’Aof. La Jeanne d’Arc de Dakar l’a remporté 2 fois, l’Union Sportive de Gorée 3 fois…Les Togolais ont remporté la dernière édition et les Ivoiriens ont remporté, en 1958, l’édition de la Coupe d’Aof. Ils ont présentés deux équipes en finale à Dakar. C’est une période où le Sénégal, en tant que pays, et les Sénégalais, en tant que dirigeants, occupaient les premières places dans le concert des nations africaines de football.

A l’époque, la plupart des dirigeants étaient des enseignants. Donc, ils avaient un côté pédagogue. C’étaient des dirigeants conscients de leurs qualités de premiers citoyens africains. Mais depuis un certain nombre d’années, on s’est rendu compte que le football et le Sport sénégalais en général ont un déficit de dirigeants de qualité parce que les enjeux ne sont pas les mêmes. Les gens étaient solidaires à l’époque, le président de la Ligue d’Aof le restait pendant très longtemps. C’est plutôt l’inverse aujourd’hui. Les gens sont pressés pour mettre les dirigeants sur des sièges éjectables. Ils n’ont plus cet esprit de continuité.

Qui étaient ces dirigeants sénégalais qui ont donné à notre football ses lettres de noblesse à l’époque ?

La Ligue de l’Aof était dirigée par  Joseph Gomis, dont une des rues de Dakar porte le nom. Autours de Joseph Gomis, il y avait Maguette Diack, le grand frère de Lamine Diack, qui était un syndicaliste, vice-président de la Ligue de l’Aof. Il y avait aussi Kantara qui était membre de la Fifa et de la Caf. Boubacar Gassama qui était le secrétaire général. Et autour d’eux, il y avait les apports des districts de Dakar, Saint-Louis, Ziguinchor…

Il y avait aussi, à l’époque, au niveau des clubs, des dirigeants, dans le centre et dans le sud, qui ont vraiment aidé le football à s’installer et à prendre son envol.

Sur le plan local, comment étaient structurés les clubs et sur quelle formule se jouait le championnat ?

Un des premiers clubs créés, c’est l’Union sportive indigène en 1929 par Amadou Mixte Guèye. A l’époque où le football était plus une affaire européenne. Et puis, l’Union sportive indigène est venue comme première équipe. Et très rapidement autour de l’Union indigène, la Jeanne d’Arc de Dakar est créée en 1930. L’Union sportive de Gorée est venue en 1933. Le foyer France-Sénégal (qui est devenu, avec les Espoirs de Dakar, le Jaaraf) en 1936. La principale caractéristique du foyer France-Sénégal, c’est que ces dirigeants étaient, à l’époque, pour la plus part des intellectuels, des enseignants. C’était vraiment un club qui a aidé à insuffler un certain nombre de valeurs. C’est l’école des Maguette Diack, Aliou Diack…

Il y avait un championnat de la circonscription de Dakar. Un championnat à Saint-Louis. Très tôt, en début des années 1930, une des premières équipes de Saint-Louis qui était le Lycée Faidherbe de Saint-Louis, où jouait feu Me Babacar Sèye, est venue jouer à Dakar pour la première fois. Il a fallu qu’on attende la Coupe de l’Aof pour permettre aux équipes de Dakar, de Saint-Louis, de Ziguinchor et de Thiès d’être régulièrement confrontées lors des éliminatoires. Sinon, il y avait une Coupe Croix-Rouge et un championnat de la circonscription de Dakar, un championnat à Saint-Louis et une Coupe du district et un championnat à Ziguinchor. En 1955 ils ont organisé un championnat interdistrict qui opposait les équipes de Saint-Louis, de Dakar et vice versa. A l’époque, la plus part des clubs étaient à dimension des territoires de l’Aof. Ce sont des clubs qui ont gagné beaucoup de choses et les joueurs avaient la particularité de bien maîtriser le sujet, férus en arbitrage… Ce sont des équipes parties des cœurs des villes et tous les jeunes des cités à Saint-Louis, à Dakar adhéraient aux équipes. C’est là où la tradition et l’histoire des clubs, comme la Jeanne d’Arc de Dakar, l’Union Sportive de Gorée, la Saint-louisienne, le foyer Casamance, sont nés et la passion s’est installée.

Vous avez dit l’histoire du football des débuts à 1969. Pourquoi 1969 est une date incontournable dans l’histoire du football sénégalais ?

1969 correspond à l’année de la réforme. A partir de 69-70, tous les clubs, sauf la Jeanne d’Arc et l’Us Gorée, ont réalisé la fusion initiée par Lamine Diack. Début des années 1960, Lamine Diack, Secrétaire d’Etat aux Sports, a initié un projet de réforme pour que les clubs deviennent forts et capables de rivaliser au niveau africain. La réforme était axée sur la nécessité de fusionner les équipes. Ce qui a donné naissance au Casa-Sports, à la Linguère de Saint-Louis, au Jaraaf de Dakar. Nous sommes partis de cette date pour dire que la première partie de l’histoire du football sénégalais, c’est celle-là. Ensuite, de 69 à 70 pour raconter l’histoire sous la nouvelle formule.

Quand on parle de réforme, c’est parce qu’il y avait problème… ?

Effectivement, et les raisons des premières crises des années d’indépendances remontent à la lutte pour la suprématie entre Dakar et Saint-Louis. Saint-Louis était déjà la capitale de l’Aof et le transfert de la capitale à Dakar a causé la bataille entre ces deux villes par dirigeants interposés. A chaque fois qu’il y avait un problème lors d’un match, la Ligue de Saint-Louis s’y mettait et celle du Cap-Vert également. En 1961, il y avait une période de crise qui n’a été résorbée qu’en 1966. C’est trois ans après que l’idée de la fusion fut née pour essayer de monter des clubs forts.

Et comment l’Equipe nationale se montait ?

Déjà, dès la fin de la deuxième Guerre mondiale, en 1948, il y avait un tournoi international qui était organisé tantôt à Dakar, tantôt à Bissau (Guinée). C’est un tournoi qui regroupait les équipes de Dakar, de Saint-Louis de Saint-Vincent et de Bissau. C’étaient les premières compétitions internationales officiellement organisées. Ensuite, il a fallu attendre 1955 pour voir une première sélection composée de joueurs de Dakar et Saint-Louis. Le Sénégal a joué son premier match amical contre la Côte d’Ivoire (4-0 pour les Lions). Cette équipe du Sénégal était entraînée par Adrien Diagne, un ancien de Gorée. L’Equipe nationale du Sénégal a commencé vraiment aux Jeux de Madagascar de 1959-1960. Le Sénégal était dans la Fédération du Mali. Donc, la première Equipe nationale était composée de Sénégalais et de Soudanais. L’Equipe nationale des indépendances a commencé en 1960. Ensuite, elle a joué les Jeux d’Abidjan de 1961, pour venir gagner les Jeux de l’Amitié de Dakar de 1963. Ensuite, il y a eu les Coupe d’Afrique des Nations de 1965, 1968. Le livre revient amplement sur toute cette période jusqu’à la réforme de 1969.

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